Benoît Séverac, Le bruit de nos pas perdus

Benoît Séverac, Le bruit de nos pas perdus

Grace et Amos sont en route pour entrer en Europe, cette forteresse si bien protégée. Elle est épuisée et veut se laisser mourir. Émilie Vaudrey a été retrouvée au pied de son lit au milieu d’un arsenal pharmaceutique à Jouy-en-Josas. Le commandant Jean-Pierre Cérisol et la lieutenant Sara Krzyzaniak, assistent à l’autopsie demandée par la procureure. Cette demande étonne le légiste car, pour lui, le suicide est évident. Mais palpant l’utérus, il détecte une présence estimée à sept ou huit semaines.
Les policiers se mettent à la recherche de proches et d’explications sur la situation sentimentale de la jeune femme. Or, la vie d’Émilie était loin d’être aussi sereine qu’affichée par la façade qu’elle présentait. Parallèlement la brigade criminelle continue d’enquêter sur ce corps momifié retrouvé dans un cimetière. Les indices s’accumulent. Mais Cérisol est confronté à un gros souci avec Sylvia, son épouse malvoyante, partie pour une compétition handisport au Japon. Elle ne donne plus signe de vie.
Et pour Grace et Amos…

Dès les premières pages de ce polar humaniste, l’auteur installe une atmosphère saisissante, mettant en place nombre de faits, d’actes, d’interrogations et une part de mystère. Il entrelace deux enquêtes, une nouvelle affaire avec cette étonnante défunte et une plus ancienne sur cette momie enveloppée dans un film plastique découverte dans le caveau d’une lignée de bourgeois.
Pour mener ces enquêtes, ces recherches d’une vérité, l’auteur retrouve Cérisol, ce commandant du troisième groupe de la brigade criminelle du SRPJ des Yvelines. C’est un policier de terrain, attentif aux moindres indices, qui cherche en s’appuyant sur des faits, mais aussi sur la psychologie de ceux qu’il rencontre, des suspects, des témoins. Un vieux Portugais, ronchon, Nicodemo et Grospierres complétaient l’équipe. Sara Krzyzaniak est une nouvelle venue qui occupe une place importante dans la présente histoire. L’auteur intègre, ainsi, un point de vue féminin, point de vue qui manquait. C’est une jeune femme de caractère, déterminée, ne se laissant pas intimider.

Si les enquêtes font le plein de tension, elles permettent au romancier d’explorer les marges de nos sociétés comme la situation douloureuse des migrants, les familles éclatées, les sans-abris, la puissance des sentiments et la volonté d’atteindre un but quelque soit les difficultés. Mais ce n’est pas une débauche d’actions musclées. La progression de l’histoire est méthodique et chaque détail a son importance. Ce sont des enquêtes où la patience, le travail d’équipe, l’intuition comptent plus que des opérations débridées.
Mais être flic, aimer son métier, n’épargne pas les soucis du quotidien, de l’existence personnelle. C’est l’évocation de rêves brisés, des vies qui basculent, la confrontation au mensonge, à l’ordinaire.

En allant à l’essentiel, avec un style sobre, une écriture précise, Benoît Séverac offre un roman policier tout en finesse et humanité, démontrant que les criminels sont souvent des femmes, des hommes ordinaires.

Benoît Séverac, Le bruit de nos pas perdus, Édition 10/18 n°6 090, coll. Polar, août 2025, 336 p. – 8,90 €.

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