A-t-il écrit un dernier poème ?

Arthur Rimbaud écrit de manière fulgurante ses célèbres poèmes. Puis, lassé, il voyage, Bruxelles, Londres, Paris. Il renonce totalement à l’écriture à dix-neuf ans et s’aventure sur les territoires africains. Il va passer les dix dernières années de sa vie dans la région de Bab-el-Mandeb, ce détroit qui fait communiquer la mer Rouge et l’océan Indien, entre Somalie, Éthiopie, Yémen… De littérature, de poésie, il n’en n’est plus question.
De Charleville-Mézières à la Corne de l’Afrique, c’est le parcours sur lequel s’engage Joël Alessandra avec pour guide le recueil de la correspondance d’Arthur – Lettres du Harar.

Tout commence quand le peintre-aquarelliste expose des œuvres, réalisées en Afrique, au musée qui est consacré à Rimbaud à Charleville-Mézières, sa ville natale. Il loge dans la maison où vécut Arthur devenue, entre autres, résidence d’auteurs. Il vit mal sa séparation avec sa conjointe. Et la nuit, il rêve que Rimbaud lui apparaît, lui dévoile qu’il existe un dernier vers… pour Mariam et lui demande de le chercher.
Parce qu’il est célibataire depuis que sa femme l’a quitté, il pense trouver, en s’engageant sur les traces du poète, l’occasion d’avancer.
Et le récit alterne le récit des déplacements, des recherches d’emplois, des activités de Rimbaud et la quête du scénariste sur les pas du poète. Il se rend d’abord à Djeddah, sur la côte d’Arabie où Arthur a fini par débarquer après s’être enrôlé dans une armée coloniale néerlandaise, avoir déserté très vite, être revenu en Europe pour finalement repartir à Alexandrie, puis Chypre.

Pour illustrer ces deux parcours, Joël Alessandra réalise un nombre impressionnant de dessins, d’aquarelles, qui mettent en lumière les régions traversées, les endroits où le poète s’est fixé quelque temps, l’environnement dans lequel il a vécu. C’est aussi la rencontre avec une femme qui se prénomme… Mariam.
C’est un travail remarquable avec une mise en couleurs sépia pour les vues du parcours du poète et des teintes éclatantes des lieux croqués par l’auteur.

Un album passionnant qui remet en mémoire le mal vivre de cet immense génie et une magnifique illustration des endroits où il a œuvré au commerce, au trafic d’arme. Un superbe volume à glisser sous un sapin, par exemple.

serge perraud

Joël Alessandra, Je est un autre – Un voyage avec Rimbaud, Éditions Daniel Maghen, août 2025, 160 p. – 24,00 €.