Refuser que l’espoir ne reste pas sans voix n’oblige pas pour autant à l’esprit de sérieux — sinon à retomber dans une littérature de témoignage qui ne conviendrait que trop peu à un poète tel que Besschops. Il porte haut les mots et pour une raison majeure : le “fou” plus qu’un autre se connaît.
Pour preuve, il se rend de temps en temps à l’asile pour vérifier son bon fonctionnement et au besoin rafraîchir ses connaissances afin rester à son avantage (et son livre le confirme) dans notre royaume de bouffons et de dingues.
Il demeure le fringant routard surréaliste que les chemins en droite ligne effraient car il sait qu’ils mènent directement au chaos. Nous l’estimons coupé, comme du gazon, de la raison. Mais lui seul est retourné à l’herbe. En son esprit qui bat la campagne, aucune âme n’est à ravauder. Il peut au besoin la lécher ou la sécher — mais les pieds plantés dans le sol.
Ne le tirons donc pas continuellement de sa terre. Et sachons découvrir sa sourde sagesse. Elle couronne sa maison de l’être d’un réveil auquel les prétendus sains d’esprit font la sourde oreille. Leurs manèges nous jouent de sales tours là où leurs vieilles lunes balancent dans le berceau des jours pour mieux occulter ce que son babil corrode.
Ici, c’est par “les trous du psychisme” que les choses se passent et les amours se dressent ou se traitent dans les béances d’un discours qui ignore les bienséances. D’autant que l’auteur sait que les pulsions ne se changent pas comme un disque et quel que soit le nombre de leurs tours et de leurs tourbes.
Mais qu’importe. Ici, la femme n’a plus d’âge. Entre la réalité de fantasmes et la fiction des électrochocs, le bonhomme de ficelle et de bois dont on fait les enclumes sonne l’heure des éclats pour se vider la tête de ceux qui l’interprètent avant de détaler sous la pluie ou battre leur rappel. Car comme les autres, le sur-réaliste n’est pas à une contradiction près.
jean-paul gavard-perret
David Besschops, Asile d’un seul, Editions Dancot-Pinchard, Belgique, 2023, 62 p.- 14,00 €.