A l’épreuve de la peinture,l’être devient nécessairement flou, se dilue à l’image des corps errants des fantômes qui nous font passer de l’illusion subie à l’illusion exhibée. Une telle image — comme le rêve — n’est pas perceptible en tant que virtualité. Nous nous croyons soudain vivre de ça, être dans le vrai.
Il existe donc une condition littorale en cette peinture en tant que lieu des extrêmes et des bords, un lieu ouvert sur les extrémité d’un ailleurs – “Enfer ou Ciel qu’importe” (Baudelaire).
La peinture n’est pas pour autant une simple fenêtre ouverte, sa découpe renvoie à un dedans, à sa luminosité ou son obscurité essentielles. Il est donc le lieu d’un rite de passage où tout s’inverse. On tombe en ce lieu, on vire au flou mais pour mieux voir en se dissolvant comme un brouillard de vif argent.
La peinture est l’échange comme figure du monde dans la partie qu’elle joue avec lui. Elle est aussi la fable du lieu anachronique où nous rêvons peut-être de glisser afin de briser notre façon de voir et de penser.
C’est une fable qui évide sa propre affabulation, qui n’est ni le propre ni le figuré, ni le pur ou le réalisé mais une zone où nous pouvons enfin verser dans le rêve éveillé où nous perdons notre capacité de penser mal et donc d’atteindre une lucidité.