Angèle Casanova a trouvé la langue de feu pour explorer l’insolite scansion d’un angle “mort” de sa vie et pas n’importe lequel. Celle qui devint orpheline n’a pas cédé néanmoins à la tentation de l’anéantissement. Certes, la luminosité extraordinaire ne peut s’afficher et pour cause mais l’auteure travaillée par ce temps s’extrait de ce qui fut une sorte de champ de mines.
Il s’agit désormais de vivre d’amour et de ne pas en mourir. Ni sombrer dans des abîmes avec l’âme aimée. Elle rampe peut-être encore dans les hautes herbes du temps où la douleur est tapie et que le livre rappelle. Mais il ne s’agit plus de se martyriser et de se sauver en un chant qui reste don d’amour..
Entretien :
Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Mon smartphone, au bout de 3 alarmes tous les quarts d’heure, répétées chacune 3 fois. Plusieurs tasses de café.
Que sont devenus vos rêves d’enfant ?
Réalité.
A quoi avez-vous renoncé ?
A être telle qu’on attend que je sois.
D’où venez-vous ?
De Neverland.
Qu’avez-vous reçu en “héritage” ?
La culpabilité. De sérieuses tendances dépressives. Et la créativité.
Un petit plaisir — quotidien ou non ?
Tenir un livre entre mes mains, et faire crisser ses pages.
Qu’est-ce qui vous distingue des autres écrivains ?
Je n’en sais fichtre rien, et cela m’indiffère.
Quel fut votre sentiment après l’écriture de votre livre sur la disparition de votre mère ?
Je me sens plus légère, et un peu désœuvrée.
Quelle est la première image qui vous interpella ?
Le reflet des petits poissons dans le bocal de ma classe en moyenne section.
Et votre première lecture ?
Un recueil grand format des années 50 des “Contes” de Perrault, aux images acidulées. Il était rangé dans la table de chevet de la chambre où je dormais chez mes grands-parents. J’y ai découvert Riquet à la Houppe et le Chat botté, entre autres contes qui ont forgé mon imaginaire.
Quelles musiques écoutez-vous ?
Du rock, notamment garage.
Quel est le livre que vous aimez relire ?
Aucun, je ne relis jamais les livres que j’ai aimés. Mais je les conserve pour toujours.
Quel film vous fait pleurer ?
Le Magicien d’Oz.
Quand vous vous regardez dans un miroir qui voyez-vous ?
Je ne me regarde pas dans le miroir.
A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
A personne. Quand je veux écrire, j’écris. Ou alors, c’est que je n’en ai pas envie.
Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
Harlem.
Quels sont les artistes et écrivains dont vous vous sentez la plus proche ?
Aujourd’hui ? James Baldwin, Annie Ernaux, Walker Evans, Weegee.
Qu’aimeriez-vous recevoir pour votre anniversaire ?
Un livre. Des livres.
Que défendez-vous ?
Mon droit à être qui je suis. Pour moi, pour les autres.
Que vous inspire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est donner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
J’aime assez la réciprocité, à vrai dire.
Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la question ?“
D’accord.
Quelle question ai-je oublié de vous poser ?
Aucune.
Entretien et présentation réalisés par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com , le 29 septembre 2021.