Claire Fourier s’est vu offrir une croisière sur le navire d’une compagnie de luxe en guise de prix littéraire. Son livre est le journal de ce voyage dans l’Adriatique. Il échappe superbement au récit de voyage. L’auteure n’est pas — contrairement à ceux qui l’entourent — avide d’exotisme et de luxe. Elle préfère le calme et la volupté. Dès lors, dans un premier temps ce séjour la déroute. Mais plutôt que de joindre l’inutile au désagréable, elle opte pour la coexistence pacifique de l’utile et l’agréable : à savoir un exercice de haute littérature aux milieux des plaisanciers qui, quoique mouillés par les embruns, semblent secs.
Elle évoque aussi et surtout ceux qu’elles rencontrent lors des séjours à terre. Ils sont plus intéressants que ses compagnons de villégiatures. Mais Claire Fourier s’amuse ou s’émeut avec la drôlerie et la sensualité qui fait sa marque de fabrique. Devant la basse cours des plaisanciers, en elle, l’animal rit. Mais sur terre, face aux autochtones elle redevient sérieuse.
Aux prises à la factualité, voire à la facticité de son périple, l’auteure fait sécher ses notes sur la corde à linge de sa mémoire au milieu des pauvres guenilles de certaines ruelles de l’ex-Yougoslavie ou des maillots de bains en usage sur son « Navire Light ». Ce qui n’était que parenthèse se transforme en butin littéraire. L’évocation ne prend pas sa source dans la tristesse mais l’espièglerie et l’ironie. La farce n’est jamais loin mais Claire Fourier reste toujours » classe » — élégante en littérature comme à la ville (ou sur le pont) et sans la moindre condescendance et mépris qui sont la marque d’une vulgarité d’esprit. .
Fascinée plus par les mots plus que par sa madeleine proustienne trempée dans l’Adriatique, l’auteure fait partager alacrité et profondeur en ce qui tient d’une excavation et d’une immersion. L’auteure ne se dérobe pas à la vanité des phénomènes et des événements périphériques qui l’entourent mais son œil sait repérer l’essentiel : le pauvre idéal des riches et l’idéal riche des pauvres — tout en évitant et pathos et logos.
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jean-paul gavard-perret
Claire Fourier, Radieuse — Une croisière en Adriatique, Editions de la Différence, Paris, 2016.
Grand merci, cher Jean-Paul Gavard-Perret, de votre lecture. Elle me fait plaisir. Elle est juste et bien écrite.
Tres beau et juste texte. Ecriture presonelle en cours…