« C’est l’amour de nous-mêmes qui assiste l’amour des autres »
Théâtre, religions, sciences naturelles et bien d’autres domaines sont abordés et approfondis par Voltaire à travers ses vingt-cinq lettres philosophiques, écrites dans la première moitié du siècle des Lumières. C’est un esprit voyageur, curieux, érudit et bien arrêté à ses heures qui s’y trouve, pour nous entretenir de ce qui fait l’actualité de son époque.
Les grands noms de divers domaines, qu’il s’agisse du politique, du commerce, des arts, des sciences et des lettres y sont présentés avec leurs mérites comme avec leurs défauts par l’auteur qui, impartial, les restitue fidèlement aux générations futures. Sa démarche historienne s’accompagne d’un ton pédagogue agréablement mêlé au langage sobre et entier du XVIIIème siècle. Homme de son temps, Voltaire prend soin d’être celui de demain, entre autres par son fameux caractère ironique.
Ainsi, commençant par les sectes d’Angleterre, il ne cesse d’y comparer la France à tous les niveaux, pour relever les failles et les réussites des deux nations rivales. Ce qui a le mérite de nous faire prendre du recul, de nous apprendre de l’histoire, de nous habituer à la critique et à l’objectivité d’un Français exilé, convaincu sur une chose, sur telle autre sceptique.
Nécessairement, les approfondissements sur les auteurs et penseurs qui lui sont contemporains ne relèvent plus maintenant que de la spécialisation pour tout lecteur investi. De la même manière, les théories scientifiques sont développées pour les amateurs d’astronomie, de physique et d’optique, dans leur justesse éternelle.
Seul bémol : un anticléricalisme assez systématique, sachant que tout réflexe évite la réflexion. Cet ouvrage permet néanmoins de se faire une vision d’ensemble de toute une époque autant que de la parcourir avec précision.
C’est honnête.
enzo michelis
Voltaire, Lettres philosophiques ou lettres anglaises, 1734, Garnier Frères (GF), 1988, 185 p. — 4,00 €.