Après des débuts marqués par l’influence de Magritte et un passage au sein de Jeune Peinture belge et CoBrA, Pol Bury, fasciné par Alexander Calder, se tourne vers la sculpture et intègre le mouvement dans son œuvre. Héritier du surréalisme et créateur d’innovation, il s’impose sur les scènes artistiques de Paris et New York. Célèbre pour ses fontaines, il ne convient pas de réduire l’œuvre à cette partie émergée d’un iceberg plein de féeries drôles et glacées dans lesquelles l’artiste n’a cessé d’interroger tous les types de volumes plastiques et littéraires.
La flèche et l’escargot permet d’accéder au méandre d’une œuvre où, sans point d’appui, tout trient debout jusqu’à ce que des formes sautent aux yeux. Explorant l’espace du support, Pol Bury construit à tâtons des naissances, des surgissements, des essais visuels. Et voici que la rose de personne nous échoit, épinglée dans le firmament de la page, sa terre ou son ciel selon qu’on soit du côté de la flèche ou de celui de l’escargot.
L’œuvre sort de la nuit des mains, tout y vaque en courbes éparpillées, des formes se tortillent ou s’évasent dans une poésie à facettes polymorphes. Pol Bury ne voit plus les mots et les choses mais l’appel au poème plastique qui traverse l’apparence. Ecrire, dessiner devient une opération et une apparition qui conduit à la question : que voit-on lorsqu’on regarde ? Existe dans ce fac-similé un chemin sans discontinuité mais en rupture avec la transcendance (entre autres).
Le livre devient un aiguillage qui à la fois emporte le regard et rabat la vision. Reste à comprendre comment cet outil de triage fonctionne et quoi où qu’est-ce qui en décide.
jean-paul gavard-perret
Pol Bury, La flèche et l’escargot, Editions le Daily Bul, La Louvière, Belgique, 2017.