Après avoir erré dans un certain engagement militant toujours un peu réducteur, sous l’impulsion de Bernard Vargaftig, Bruno Roy, Claude Louis-Combet, Emmanuel Laugier entre autres, J-C Meffre a osé une poésie plus profonde aux sources plus recluses et moins inaccessibles Néanmoins, la possibilité mystique est toujours contrebalancée par la puissance du corps.
C’est donc “naturellement ” que le poète a trouvé dans Simone Pelligrini, hipster avant la lettre mais hispster habité, un semblable. L’univers plastique de l’Italien trouve des échos dans toute l’œuvre du poète français. Ce que l’artiste scelle dans ses graines renvoie à une vision particulière du chant amoureux là où pourtant sa nature n’est que suggérée.
Le soufisme assumé n’empêche par ce que le corps entraîne de clairières et d’éboulements. Au paysages extérieurs où parfois l’auteur aime à se perdre, Pelligrini propose une vision plus intérieure. Dans ses enclos, Meffre trouve de quoi rassembler des mots épars, disjoints de l’idéalité. D’où ce dialogue heurté mais en répons.
Pelligrini fait le vide auteur de ses dessins et l’auteur sait en évoquer le suspens. Tout travaille entre l’enclos et l’ouvert, l’appel implicite de ce qui dans le corps est ciel et sol. Et en dépit de ses évocations paysagères, le poète n’est jamais plus fort lorsqu’il passe par la porte étroite de la matière humaine. Il a trouvé dans l’artiste un pont encore plus efficient que ceux qu’il a lancés avec les peintures de Badaire ou les photographies de Sussman. L’intimité des volumes de l’artiste pèse sur l’écriture mais en même temps lui permet d’affirmer le nœud et poids de l’existence : ils se déportent des montants de l’image sur ceux de l’écriture.
jean-paul gavard-perret
Simone Pellegrini e&Joël-Claude Meffre, Dans la chambre du silence, Nella stanza del silenzio, Texte italien de Bruno Rombi., Fata Morgana, Fontfroide le Haut, 207, 24 p.