
Robert J. Lloyd, L’Ombre de Paris
Ah, ces luttes pour le pouvoir…
Les lecteurs ont pu découvrir l’œuvre policière historique de Robert J. Lloyd avec La Société royale (Sonatine – 2023). Apparaissait dans ce roman, Robert Hooke, un éminent scientifique de la Société royale de Londres, qu’Allan Chapman a surnommé Le Leonard d’Angleterre. Avec L’Ombre de Paris, il revient, en 1679, dans une nouvelle enquête avec Harry Hunt, son protégé.
C’est Harry qui reçoit une missive de Sir Jonas Moore l’invitant à venir à Denver, dans le Norfolkshire, pour donner un avis sur un mort. Grace Hooke, la nièce du scientifique l’accompagne, contre son gré, déguisée en homme. L’ambiance dans le pays est délétère, la crainte de conjurations est très présente, des conjurations ourdies surtout par des catholiques.
Lorsqu’ils découvrent le cadavre, resurgit après des années en immersion, celui-ci porte des lambeaux d’uniforme et a un boulet de couleuvrine sur l’estomac. Sa taille fait penser à un garçonnet mais le squelette est celui d’un adulte. Il est vite identifié comme étant Jeffrey Hudson, le nain offert à la reine Henriette-Marie. Or, un nain, portant la même identité, est toujours en vie. Sir Jonas demande à Harry de le retrouver car… il a disparu ! Et voilà Harry et Grace lancés dans une quête qui va les mener jusqu’à Paris, en grand danger
Robert J. Lloyd met en scène une histoire solide où les intervenants de fiction cohabitent heureusement avec les protagonistes authentiques dans des situations qui entremêlent aussi avantageusement la réalité historique et des faits issus de l’imagination fertile du romancier. Celui-ci décrit avec précision les lieux, les événements, la succession de ceux-ci avec un tempo en tension. C’est ainsi qu’il va faire entrer son couple de héros dans les milieux bibliophiles parisiens, dans les hautes sphères pour remonter la piste d’un incroyable complot.
Il fait état des débuts de la science moderne, mobilise l’affaire des Poisons, le complot papiste et les luttes fratricides entre protestants et catholiques, que ceux-ci vivent en France ou en Angleterre.
La galerie des acteurs du drame est copieuse. Outre les personnes déjà citées, les enquêteurs vont rencontrer, travailler, se confronter avec, par exemple, Gabriel Nicolas de la Reynie, lieutenant général de police de Paris, Hortense Mancini, duchesse de Mazarin, sa sœur Marie-Anne, la reine Catherine de Bragance, l’épouse de Charles II, Isaac Newton… Grace porte des vêtements masculins prêtés par Denis Papin.
Amateurs d’intrigues retorses, aux nombreuses ramifications, de complots ourdis de belle manière et d’une enquête, pour les faire échouer, menée de main de maître, n’hésitez pas, ce roman est fait pour vous. Tous les autres prendront un grand plaisir à entrer dans un récit à l’intrigue enlevée, érudite.
serge perraud
Robert J. Lloyd, L’Ombre de Paris (The Poison Machine), traduit de l’anglais par Paul Simon Bouffartigue, Éditions Sonatine, octobre 2024, 592 p. – 24,50 €.