Cécile Odartchenko, Journal (1999/2003) & Confins

Bouli­mie existentielle

L’écri­ture de Cécile Odart­chenko ne se situe pas dans l’indicible mais dans la matière même des émo­tions et de la sen­sua­lité.
Qui de plus jeune qu’une telle octo­gé­naire, amou­reuse impé­ni­tente et dont l’intelligence comme l’écriture reste d’une acuité extraordinaire ?

La créa­trice s’empare des arpents de tout ce qu’elle a vu et connu afin de créer son propre ordre et désordre men­tal afin d’en reti­rer ce qu’elle méta­mor­phose dans un lan­gage mobile. Il devient la méta­phore agis­sante et obsé­dante de l’existence.
Et même le confi­ne­ment n’a pas eu rai­son de sa faim de vivre : son jour­nal Confins (- mars, avril, mais 2020, les Adjots) demeure pour le prouver.

Sans exhi­bi­tion­nisme mais sans fausse pudeur, l’auteure dit tout : les ter­reurs éprou­vées concer­nant son propre corps et le désir de ce qui dif­fé­ren­cie la femme de l’homme : «cette pièce essen­tielle à mon édi­fice, le mât de ma barque». Les mâles - on le com­prend — tra­versent son Journal et l’histoire de sa vie telle quelle se sublime plus qu’elle ne se décline dans “Une femme heu­reuse”.
Amants ou épis­to­liers, com­pa­gnons en poé­sie et en arts sont là pour le meilleur et pour le reste aussi. Au nom de l’injonction pre­mière : pleu­rer et jouir.

Dans ce mael­strom — et comme tout être — l’auteure tra­duit sa bou­li­mie exis­ten­tielle. Elle accepte et reven­dique ce que beau­coup pren­dront pour de l’égarement mais qu’importe.
L’intimité est là — sexuelle mais pas seulement.

Cécile Odart­chenko sait com­bien ceux qui, pour des rai­sons de confort, de lâcheté ou de manque à vivre ignorent les rai­sons du corps et de la pen­sée. L’auteure refuse toute abdi­ca­tion.
Res­tent un magma d’existence, un trem­ble­ment vital. Les mots en débordent dans de tels livres de désir lan­cés vers l’autre.

Afin que les cœurs battent encore la cam­pagne, même en période de confinement.

jean-paul gavard-perret

Cécile Odart­chenko,
- Jour­nal (1999/2003), Propos2éditions, 2020, 600 p. — 28,00 €.,
– Confins, même édi­teur, 2020, 102 p. — 15, 00 €. 

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