Poète spécialiste de la vision et de l’art du décadrage, Etienne Faure joue des variations de focale et d’angle propices à des rapprochements inattendus, avec souvent une distance dans la distance en fin de poème.
Le théâtre de la langue, avec une constance ironique, accorde une attention minutieuse aux gestes, aux façons de faire, aux expressions largement partagées tels des secrets exhibés en ses poèmes. Existe un équilibre entre rapprochement et éloignement dans une écriture volontairement déroutante (à l’image de la figure qu’induit le titre) afin de créer des mises en perspective d’un en-dehors ou d’un après-coup.
Une telle posture crée des motifs incertains « même lorsque l’amour dans la marge à la verticale, tisse finalement par-dessus les phrases » de l’inextricable renversant forcément lorsque la boîte crânienne « composée d’os, de cervelle et de nerfs secoue ses souvenirs mêlés ». La tête ainsi « levée » prend une résonance particulière en un coup lancé à elle-même.
Mais c’est une manière d’alléger la gravité et d’éloigner le pathos par instinct de contrariété en sortant le poème de toute solennité. Le rire et une « ivresse de la beauté » teintent ce qui nous pend tous au nez : la mort que l’on se donne ou qui nous est donnée.
jean-paul gavard-perret
Etienne Faure, Tête en bas, Gallimard, coll. Blanche, 2018.