Henri Thomas, Silence et soleil dans la chambre

Calme, silence et presque absence

C’est grâce entre autres à Jean-Claude Pirotte, George Per­ros et quelques autres amis que l’œuvre d’Henri Tho­mas est sor­tie de l’ombre. Depuis, elle va son che­min et des­sine celui de l’auteur jusqu’à sa fin comme le prouve ce texte d’une cer­taine manière pré­mo­ni­toire. Il sou­ligne le pro­ces­sus exis­ten­tiel du poète et écri­vain.
Le livre se situe en automne (celui de la vie ?). Un homme contemple la résis­tance d’une plante dans une fis­sures du para­pet du pont Louis-Philippe net­toyée pour­tant chaque hiver L’homme com­plète son obser­va­tion par celle d’un couple qu’il suit depuis long­temps. Sa vie sem­ble­rait presque réglée sur la leur. Au sein de cette dépos­ses­sion (thème cher à Tho­mas) jaillit l’émerveillement du monde là où il ne sem­ble­rait pas avoir droit de cité.

Ce que l’auteur retient n’est plus le luxu­riant « lilas (qui) fleu­rit sous la lune ». Et il n’existe même plus de ces « filles à gorge brune » qu’évoquait Tho­mas et qui lui ouvraient leur lit. Tout est calme, silence et presque absence. La volupté prend un aspect beau­coup plus étouffé en cette végé­ta­tion sau­vage au-dessus du fleuve. Celui-ci n’est plus seule­ment la Seine mais la cou­lure de l’existence et la seule image que le jour ne peut mon­trer. L’homme « n’a regardé la plante qu’un bref ins­tant, elle lui est appa­rue, et une appa­ri­tion n’a pas besoin de temps.» Mais elle n’est pas seule­ment le bon­heur d’un seul ins­tant.
Le drame des jours qui passent annonce que la grande nuit arrive pour dis­soudre la vie à l’épreuve du temps. Mais Tho­mas sait encore attra­per ce qui l’éveille au sen­ti­ment d’admiration. Celui-ci est aussi ténu que résis­tant. Ce n’est donc pas seule­ment la pous­sière qui envi­ronne les pierres : une mince vie avance, vibre et tremble au pas­sage des pié­tons de Paris. Et peut-être, dans son mince filet d’existence, demeurera-t-elle plus résis­tante qu’eux.

jean-paul gavard-perret

Henri Tho­mas, Silence et soleil dans la chambre, Edi­tion et post­face de Luc Autret, des­sins de Paul de Pignol, Fata Mor­gana Edi­tions, Font­froide le Haut, 2018 , 72 p. –90,00 €.

Leave a Comment

Filed under Arts croisés / L'Oeil du litteraire.com, Poésie

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>