Philip Roth, Romans et nouvelles — 1959 –1977

La pas­to­rale urbaine

Scan­da­leu­se­ment oublié par les Nobel depuis des années — qui pour cou­ron­ner la lit­té­ra­ture amé­ri­caine ont bradé l’année der­nière leur prix à un bala­din sur­coté -, Phi­lip Roth reste celui qui aura donné de son pays une image inou­bliable par sa force, son élé­gance, son iro­nie.
Le volume de La Pléiade ramène à l’aube de l’œuvre, à l’époque où Roth construit son image grâce au recueil de nou­velle « Good­bye Colum­bus » et sur­tout « La plainte de Port­noy » (nou­veau titre moins par­lant que l’original « Port­noy et son com­plexe »).

Le livre fait scan­dale dans la com­mu­nauté juive qui se sent inju­rié par une vipère éle­vée en son sein. Il est vrai qu’à l’époque une telle gouaille lin­guis­tique dépote. Mais le roman est magis­tral. Port­noy devient un des masques de l’auteur. Il va pour­suivre quelque temps sa saga popu­laire tout en décli­nant d’autres figu­ra­tions (dont un pro­fes­seur méta­mor­phosé en glande mam­maire en un clin d’œil à Kafka).
Appa­raît aussi le suc­ces­seur de Port­noy : Zucker­man — sans doute son double le plus proche et qui devien­dra plus tard le héros du plus grand livre de l’auteur :  La Pas­to­rale Américaine.

Pour l’heure, il convient de reprendre ces œuvres pre­mières lou­foques, gouailleuses, impi­toyables et leur poly­pho­nie de voix là où la fable, la cri­tique sociale et la saga sar­cas­tique trouvent une dimen­sion impres­sion­nantes. Moins typé que Sin­ger — et sans doute pour cela plus popu­laire -, Roth reste le maître de l’humour roma­nesque. Dénouant bien des pièges, par son audace de ton, il fait du dis­cours sur la réa­lité un diver­tis­se­ment épique et (im)pitoyable.
Et c’est sans doute ce qui donne aux aven­tures de Port­noy et de ses clones une vision aiguë du monde tel qu’il est.

jean-paul gavard-perret

Phi­lip Roth, Romans et nou­velles — 1959 –1977, NRF, Gal­li­mard, coll. Pléiade, Paris, 2017.

1 Comment

Filed under Beaux livres, Nouvelles, Romans

One Response to Philip Roth, Romans et nouvelles — 1959 –1977

  1. Villeneuve

    La Pléiade et JPGP suf­fisent à la recon­nais­sance du talent de Phi­lip Roth .

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