Edward Olive entre passé et futur : entretien avec l’artiste

Edward Olive crée des images inso­lites fait de courbes et de fron­tière indé­cises. Elles per­mettent de décou­vrir de l’inconnu dans le réel et quel que soit le genre de son tra­vail : com­mande ou créa­tion « pure ». Le corps absorbe une par­tie de ce que la lumière émet. Il existe alors sou­vent du calme et de la volupté dans les prises argen­tiques. Et par­fois une com­mu­nauté inavouable parce que sou­dain l’idéalité comme la réa­lité est réduite à rien afin que jaillisse l’approche d’une expé­rience inté­rieure inédite et pour­tant évidente.

Entre­tien :

Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Si je mets la son­ne­rie de mon réveil pour me lever, en géné­ral c’est pour aller a des cours de Zumba ou yoga. Des fois, les week-ends, je me lève tôt en vue d’un dépla­ce­ment pour des pho­tos de mariage.

Que sont deve­nus vos rêves d’enfant ?
Mal­heu­reu­se­ment, par néces­sité, j’ai dû deve­nir plus prag­ma­tique. J’ai tou­jours des rêves mais je me rends compte que j’existe dans la vraie vie. Je vis tout ce que je peux de la manière la moins confor­miste pos­sible mais la liberté totale du rêve existe seule­ment dans quelques unes de mes photos.

A quoi avez-vous renoncé ?
J’ai renoncé à la vie plus conven­tion­nelle des gens “nor­maux” : mai­son avec petit jar­din et grand emprunt, 2 voi­tures, épouse, 2 enfants et tra­vail de 9.00 a 19.00. Je tra­vaillais dans un bureau comme “tout le monde” avec la fiche de paie à la fin de chaque mois, un plan de pen­sion de la boîte et l’assurance médi­cale payée. Un jour j’ai tout laissé. Vivre en dehors du monde du tra­vail fixe est dans un sens plus dur mais je me suis échappé et on ne va jamais me rat­tra­per. Dans ce sens, je n’ai renoncé à rien.

D’où venez-vous ?
Je viens d’une famille où les autres savaient faire des choses artis­tiques : dan­ser, faire de la musique ou peindre. Mais pas moi. J’étais le seul sans talent et tou­jours le pire dans l’école en art. C’est beau­coup plus tard que j’ai com­mencé les cours d’art dra­ma­tique et que je suis devenu pho­to­graphe autodidactique.

Qu’avez-vous reçu en « héri­tage » ?
Je crois que j’ai de la chance de vivre en ce moment dans un monde où on sait presque tout du passé mais en même temps on pro­fite des avan­tages du futur. Du passé on garde une pla­nète qui n’est pas tout à fait détruite et des pro­duits chi­miques tou­jours en vente pour déve­lop­per des papiers pho­tos. Du “futur” on pos­sède aussi des avan­tages. Par exemple, les gens peuvent lire cet entre­tien sur Inter­net et voir où ache­ter mes pho­tos dans n’importe quel pays du monde sur le web sans sor­tir de chez eux. Sans les pel­li­cules et pro­duits chi­miques de l’argentique je serais très triste car je n’aurais pas les moyens de m’exprimer comme je veux. Sans la publi­cité, gra­tuite, ouverte a tous et démo­cra­tique de l’Internet, je serais aussi triste avec mes pho­tos dans une boîte en car­ton dans la pous­sière, sous le lit.

Qu’avez vous dû “pla­quer” pour votre tra­vail ?
Il n y a pas suf­fi­sam­ment d’heures dans l’année pour toutes les choses que j’aimerais ou devrais faire. Je fais ce que je peux.

Un petit plai­sir — quo­ti­dien ou non ?
Le plai­sir plus impor­tant, c’est d’avoir du temps pour faire des choses pour moi. Si cela est quo­ti­dien, c’est encore mieux. Je passe beau­coup de temps à faire des pho­tos ou d’autres tra­vaux com­mer­ciaux, juste pour gagner ma vie. C’est donc un grand plai­sir d’avoir du temps, de temps en temps, pour faire des pho­tos plus per­son­nelles argen­tiques déve­lop­pées  à la main dans ma chambre noire.  Les pho­tos sont plus floues mais plus “artis­tiques”. Il n y a rien de mieux pour moi que d’éteindre les télé­phones, email et what­sapp et pas­ser des heures a faire quelques pho­tos seul dans ma chambre noire,  du genre à celle qu’on voit sur ce lien.

Qu’est-ce qui vous dis­tingue des autres artistes ?
Des fois, je pense que j’ai vendu mon âme au diable en fai­sant des pho­tos numé­riques seule­ment à moi­tié artis­tiques juste pour gagner la vie. Dans ce sens, je suis basique et pas inté­res­sant. Je vais donc répondre en par­lant seule­ment des pho­tos vrai­ment prises avec inten­tion 100% artis­tique.
Je pense que c’est une com­bi­nai­son : d’une part de moi-même et de mes déci­sions tech­niques et artis­tiques. De l’autre, de la volonté de lais­ser les choses se pro­duire au hasard. J’adore des appa­reils et objec­tifs des années 60–70, mon équi­pe­ment de chambre noire est aussi des années 70 et mes films ont tous une date limite d’utilisation dépas­sée de 10 ans. Ça pro­duit pas mal de hasard dans le résul­tat final. Ce 50% de hasard peux détruire des pho­tos ou les rendre d’un autre monde. La chi­mie peut deve­nir l’alchimie. On pour­rait dire que ce n’est pas du talent, c’est du hasard.
Il existe main­te­nant très peu de pho­to­graphes pro­fes­sion­nels qui uti­lisent tou­jours de telles tech­niques d’impression et encore moins qui impriment des pho­tos en cou­leur (copies ra-4 de néga­tifs c41 ou dia­po­si­tifs xpro c41). Il y en a encore moins qui le font pour les mariages. Je peux être moins bon qu’eux mais je pense mon­trer quelque chose d’intéressant et de dif­fé­rent. Des clients se sou­viennent des vieux temps quand toutes les pho­tos étaient tirées à la main. Il y a aussi des nou­velles géné­ra­tions de clients qui n’avaient jamais vécu ces temps-là mais qui les appré­cient comme un rêve nos­tal­gique.
Ce qui est sur­réa­liste est que je peux faire une photo aujourd’hui d’une per­sonne : mais la photo paraît d’une autre époque ou sans époque — “time­less” grâce à mes tech­niques. Je par­ti­cipe du monde moderne (et j’en pro­fite pour me vendre sur Inter­net et pour vendre mes pho­tos dans des agences online de vente de droits (comme dans le image bank Arcan­gel  ou de pro­duits comme dans Saat­chi  ou Red­bubble) mais je ne me sens pas tout a fait de notre temps. Quand je vois des vidéos banales en direct de tout le monde sur l’Internet, j’ai du mal à m’identifier avec notre époque. Pour moi, des pho­tos ou des vidéos doivent être des rêves. La bana­lité du temps est visible tous les jours dans le quo­ti­dien. Je ne cours pas der­rière la mode pour essayer d’en faire par­tie. Je fais ce que je fais. On l’aime ou on ne l’aime pas. Ce que je fais n’est pas à la mode, c’est donc indé­mo­dable.
J’aimerais pen­ser que je mets des élé­ments uni­ver­sels dans mes pho­tos de rue : la beauté, désir, un sens de rêve et dans mes pho­tos de mariage ou por­traits d’enfants, de vraies émo­tions cap­tées et des émo­tions pro­vo­quées chez le spec­ta­teur par l’élégance et un aspect intemporel.

Pour mieux faire com­prendre ce que je fais, je vais prendre l’exemple une femme qui veut offrir quelques pho­tos éro­tiques d’elle pour le cadeau d’anniversaire de son mari. Elle ne veut pas du Ins­ta­gram.. Peut-être n’a-t-elle pas 20 ans et ne cherche pas un style hyper­réa­liste. Sa réa­lité, elle la voit tous les jours dans sa glace. Mes pho­tos seront  sans du “Pho­to­shop”, ni du lif­ting pho­to­gra­phique. Je crée une Photo per­son­na­li­sée par mon regard, mon tirage, mon déve­lop­pe­ment.
Pour des jeunes mariés qui veulent un repor­tage fidèle au prix plus acces­sible, je peux faire un repor­tage avec des appa­reils numé­riques, auto­fo­cus et tout ce que la vie moderne me donne pour m’aider. En même temps, je cherche aussi faire quelques por­traits plus signi­fi­ca­tifs pour mettre en grand chez eux et alors là  je peux faire aussi des prises en argen­tique à tirage manuel.
Avec un bud­get plus impor­tant, je peux faire un film. Je deviens un “sel­lout” adap­table aux pos­si­bi­li­tés éco­no­miques de chaque client. J’essaie de le jus­ti­fier en me disant que je fais ce que je peux pour aider les gens qui veulent vrai­ment avoir mes photos.

Com­ment définiriez-vous votre approche du corps dans votre tra­vail ?
Il faut bien le choi­sir car il est autant impor­tant que le pho­to­graphe. Il n y a rien de pire que des repor­tages des Kar­da­shian et d’autres célé­bri­tés et encore pires leurs pho­tos “à poil” ou presque. Les déci­sions tech­niques et artis­tiques doivent être plus impor­tante lorsqu’il s’agit de nu. Je peux faire quelques pho­tos “nor­males” et réa­listes pour un client, mais s’il s’agit du corps nu dans la photo il faut cher­cher beau­coup plus loin et je suis dans ce cas beau­coup plus radi­cal. J’aime ajou­ter beau­coup d’éléments dans les pho­tos de nus : des espaces vides, des cou­leurs pas réa­listes, un grain fort qui couvre tout, des lumières fortes, des sombres très sombres, la pré­sence d’autres élé­ments dans la pho­tos: des lumières et filtres très osés. Je choi­sis alors mes meilleurs appa­reils et objec­tifs, mes meilleures pel­li­cules, un maquillage pro, les meilleurs lieux, le meilleur moment du jour pour la lumière, ainsi qu’un soin accen­tué pour le choix des sous-vêtements et la mise en scène des man­ne­quins pour les favo­ri­ser etc. etc…

Quelle fut l’image pre­mière qui esthé­ti­que­ment vous inter­pella ?
J’ai tou­jours plu­sieurs images dans ma tète que je n’ai pas encore faites ou que je n’ai pas encore faites comme je veux les faire mais je pré­fère ne pas tout racon­ter avant de pro­duire mes pho­tos ins­pi­rées pas ces images.

Et votre pre­mière lec­ture ?
A l’école j’ai fait un bac de langues et lit­té­ra­ture et j’aimais tout ce que les profs me don­naient. Ça m’aidait beau­coup que, par ailleurs, mes parents aient tou­jours plein de livres inté­res­sants et e diverses langues chez nous A la fac j’ai fait des études de droit avec énor­mé­ment de livres et ça m’a laissé un peu d’overdose pour de gros livres. Pen­dant des années je ne lisais rien. J’ai recom­mencé à lire quand j’en ai eu marre d’être avo­cat mari­time et que j’ai com­mence à étu­dier l’art dra­ma­tique la nuit. Je me disais que je pou­vais faire des études grâce à des mètres de livres. J’achetais des cen­taines de pièces de théâtre de Xavier Dur­rin­ger, John God­ber, Oscar Wilde, Caryl Chur­chill, Arthur Mil­ler, Tom Stop­pard, Ten­nes­see Williams… que je lisais sans cesse en évi­tant le tra­vail ennuyeux d’avocat. J’adorais lire les scé­na­rios de films, même plus que voir les films, et j’achetais tous ce que je pou­vais trou­ver dans les maga­sins. J’allais à Cha­ring Cross Road (entre Lei­ces­ter Square et Oxford Street a Londres) dans les maga­sins de livres d’occasion où les livres ne sont pas seule­ment beau­coup moins chers mais aussi plus inté­res­sants quant à leur odeur du vieux papier et les pho­tos de cou­ver­ture d’autre époque.
Je suis sans doute influencé pho­to­gra­phi­que­ment par des livres de fic­tion que j’ai lus, et dans un sens très posi­tif parce que les images qui sortent de mon ima­gi­na­tion pro­viennent de mes lec­tures. Elles me sti­mulent en don­nant l’occasion de créer des pho­tos ori­gi­nales qui ne doivent rien aux cinéastes ou d’autres artistes visuels. Avec l’Internet, c’est plus facile trou­ver des scé­na­rios de films et des séries de télé­vi­sion comme pour exemple avec Drew’s Scrip­to­rama. Mais dans un sens, ce n’est pas pareil et j’achète tou­jours de livres d’occasion sur Ama­zon. Plus qu”acheter des livres, main­te­nant mon plus grand plai­sir est de voir mes pho­tos sur les cou­ver­tures de livres. Je vends sur­tout des pho­tos argen­tiques pas trop des­crip­tives. Elles montrent quelque chose mais n’influencent pas trop les lec­teurs dans leur ima­gi­na­tion libre.

Quelles musiques écoutez-vous ?
J’ai le Spo­tify Pre­mium et j’aime bien la mettre comme musique de fonds quand je tra­vaille. On peut le voir sur mon Spo­tify (https://open.spotify.com/user/113433092). J’écoute de l’acid jazz, funky et jazz funk comme Fun­da­ción Tony Manero et Jami­ro­quai ; funky house, disco, nu-disco et dance comme Sam Sparro, Me & My Too­th­brush, Bob Sin­clar, Mas­simo Vanoni, Nile Rod­gers, Jus­tin Tim­ber­lake, Chris Brown, Bruno Mars; Rap/hiphop comme Chi­rie Vegas, Flo Rida et Snoop Dogg ; dans le latino, la salsa de Marc Anthony, Grupo Extra, Oscar d’Leon, Tito Nieves, Gil­berto Sanat Rosa, la bachata comme Toby Love, Prince Royce et Romeo San­tos, le regue­ton comme Daddy Yan­kee, Pit­bull et Maluma ; la soul comme Bobby Womack, R. Kelly, Al John­son, D’Angelo, Kizomba/ Zouk, Chil­lout… un peu de tout.
Sou­vent, je mets une cer­taine musique pour les man­ne­quins lors d’une séance pho­tos pour créer une cer­taine ambiance ou contri­buer à une cer­taine émo­tion. La musique me donne aussi beau­coup de plai­sir quand je vois les musi­ciens qui choi­sissent mes pho­tos pour leurs albums. Quand j’aurais le temps je vais faire des pho­tos pour eux en pen­sant à chaque genre de musique et son ambiance.

Quel est le livre que vous aimez relire ?
J’ai chez moi un mur de livres de pho­to­graphes. Quand j’ai du temps je m’y replonge. Je regarde plus des pho­tos que les mots et on y voit quelque chose qu’on n’a pas sur un écran. Il existe une dif­fé­rence concrète entre un écran et un livre. Un écran pro­duit de la lumière et un livre reflète la lumière. On appré­cie mieux les pho­tos dans leur état natu­rel sur papier que dans un site web ou pdf télé­chargé.
Mes sites favo­ris pour revi­si­ter les livres de Richard Ave­don, David Bai­ley,Hel­mut New­tonMario Tes­tino, Nigel Parry , Jean Loup Sieff, Guy Bour­din et des livres de pho­tos de Life et Vogue.
Me remettre dans ces livres de pho­to­graphes me fait pen­ser à de nou­velles idées. Pas­ser une heure sur mon sofa avec un seul livre d’un pho­to­graphe aide à me sen­tir connecté avec l’intention de l’auteur. J’ai aussi plein de guides de pho­to­gra­phie pro­fes­sion­nelle anciens que j’achète sur Ama­zon. J’aime sur­tout ceux de l’époque où les cou­leurs étaient moins vives et les nues artis­tiques avaient des poils. Je vais aussi sur You­tube pour regar­der de nou­veau Dark­ness & Light avec Richard Ave­don ou Hel­mut by June avec Hemut New­ton (and Alice Springs), ça me donne tou­jours envie de me remettre ensuite dans leurs livres.

Quel film vous fait pleu­rer ?
En géné­ral, je ne parle pas de mes sen­ti­ments ou de ma vie pri­vée. Je pré­fère expri­mer des émo­tions avec mes pho­tos ou mes rôles d’acteur. C’est peut être pour ça que j’aime tra­vailler comme pho­to­graphe ou comé­dien. Peu m’importe que les gens me voient en train de pleu­rer ou de faire pleu­rer le public, d’être nu devant un public ou d’avoir des gens nus devant moi : ce n’est pas moi si c’est une créa­tion artis­tique pour un film ou une photo.
En plus je pense qu’on va plus aimer mes pho­tos si on ne sait pas grand chose sur ma vraie vie ou mes sen­ti­ments. Sur­tout, dans mes pho­tos de mariages je capte des pho­tos des per­sonnes en train de pleu­rer ou je fais pleu­rer des mariés quand ils voient mes pho­tos. Je gagne ma vie dans le busi­ness “larmes”… Je capte et pro­voque des émo­tions mais per­sonne ne sait rien sur mes émo­tions et je crois que c’est mieux comme ça.
Il y a une mode des gens connus à trop s’exposer sur Inter­net et dans la presse, sans se cacher et sans contrô­ler le contenu et la qua­lité des images. Je pré­fère voir un film et des per­son­nages de fic­tion sans pen­ser a la vie pri­vée des acteurs — le “willing sus­pen­sion of dis­be­lief”. Si on voit mon Ins­ta­gram on voit mon tra­vail mais on ne me connaît pas. On ne sait rien sur moi. J’apparais et je pars. Ce qui res­tent ce sont les pho­tos que j’ai prises. Il n’est pas impor­tant de me connaître pour aimer ou détes­ter ce que je fais. Je ne veux pas dic­ter com­ment com­prendre mes pho­tos ni influen­cer ce qu’on voit lorsqu’on regarde mon travail.

Quand vous vous regar­dez dans un miroir qui voyez-vous ?
J’ai la mala­die de tra­quer les lumières et les sombres, les angles pos­sible sur le corps, que ça soit le mien dans le miroir ou celui des autres. Il est dif­fi­cile de faire la lumière sur soi-même comme pho­to­graphe et man­ne­quin à la fois . Sur les nus, la lumière a une impor­tance incroyable. Le truc c’est de voir com­ment le corps réagit à des lumières dif­fé­rentes. Chaque fois que j’ai un miroir dif­fé­rent avec une lumière dif­fé­rente, j’en pro­fite pour étu­dier. Je regarde les angles et les lumières et aussi des cou­leurs et Kel­vins.
Sur l’Internet je vois des gens dans les miroirs en train de s’admirer dans les sel­fies où on peut appré­cier le papier cul der­rière eux . Je n’aime pas cette réalité.

A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
J’écris a des gens si je veux le faire. Si ils ne répondent pas, je n’insiste pas.

Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
Robert Dois­neau ou Ave­don ont créé l’idée d’un Paris roman­tique mais il auraient pu l’inventer n’importe où. Paris n’est pas for­cé­ment com­ment dans ses pho­tos.
Pour moi et pour mes pho­tos, le plus impor­tant n’est pas la ville, c’est avec qui tu es, et ce que tu fais avec cette per­sonne. J’ai fait des pho­tos par exemple à Beni­dorm : on n’imaginerait jamais que c’est Beni­dorm. Quand je suis dans une telle ville, je peux tou­jours inven­ter autre chose. Le pho­to­graphe est plus impor­tant que le lieu pour les pho­tos. Mar­tin Parr à Beni­dorm fera du Mar­tin Parr 200% mais Patrick Lich­field te don­nera autre chose, tota­le­ment dif­fé­rent. Même dans mes pho­tos de mariages, le “pho­to­jour­na­lisme” doit avoir une vérité : le mariage n’est pas vrai­ment comme on voit dans les pho­tos. On voit une illu­sion de beauté, de romance, d’élégance, d’émotions posi­tives qui sont seule­ment une par­tie de l’ensemble. Elle cache tous les élé­ments qui ne sont pas inté­res­sants pour l’histoire que les gens veulent que je raconte dans les pho­tos. Je montre ce que je choi­sis de mon­trer et je cache ce que je veux cacher.

Quels sont les écri­vains et artistes dont vous vous sen­tez le plus proche ?
J’adore les pho­to­graphes qui montrent le monde de leur époque . Ils ont de fait fabri­qué leur époque dans les pho­tos publiées dans des maga­zines de mode, des publi­ci­tés ou des cou­ver­tures de disque comme les anglais David Bai­ley, Terry O’Neil ou Bryan Duffy. Ils pou­vaient faire des mer­veilles avec peu de moyens et tout en se moquant de ce que pen­saient les autres.
J’adore aussi des artistes qui sont capables de créer leur propre uni­vers comme le pho­to­graphe génie espa­gnol post-Dali/Picasso, qui vit aussi a Madrid, Chema Madoz ou Storm Thor­ger­son, sur­tout connu pour les albums de Pink Floyd.

Qu’aimeriez-vous rece­voir pour votre anni­ver­saire ?
Un long voyage tran­quille et détendu sans la sen­sa­tion que je devrais être en train de travailler.

Que défendez-vous ?
J’aimerais bien pou­voir aider, dans un sens pho­to­gra­phique, des causes comme Amnesty Inter­na­tio­nal, Green­peace et People for the Ethi­cal Treat­ment of Ani­mals (PETA). Je leur ai écrit mais il ne m’ont tou­jours pas répondu… et ça fait des années que j’attends. S’ils lisent cet entre­tien, ils peuvent m’écrire pour qu’on fasse des chose ensemble.
Ici en Espagne, je suis contre les spec­tacles de tau­reaux, la vio­lence contre la femme (tou­jours très pré­sente) et tous les hommes poli­tique cor­rom­pus qui nous ont plon­gés dans la crise il y a peu de temps.

Que vous ins­pire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est don­ner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
Pas forcément.

Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la ques­tion ?“
Ça dépend quelle est la demande.

Quelle ques­tion ai-je oublié de vous poser ?
Je crois que j’ai déjà ennuyé tout le monde suf­fi­sam­ment. Si des lec­teurs veulent en savoir plus, ils pour­rait poser des ques­tions en bas et je pour­rais essayer de répondre.

Pré­sen­ta­tion et entre­tien réa­li­sés par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com, le 30 avril 2017.

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