Jean-Paul Bota, La boussole aux dires de l’éclair

Dépla­ce­ments

Jean-Paul Bota pré­sente avec  La Bous­sole aux dires de l’éclair ses « exer­cices sur des lieux » tirés de ses car­nets de voyage ou autres notes plus ou moins datées ou situées avec de nom­breux ren­vois impli­cites ou non à des artistes ou peintres ou écri­vains et entre autres sous forme de cita­tions. L’auteur s’y fait éru­dit — presque trop par­fois - en des vignettes qui, en consé­quence, peuvent par­fois fri­ser une cer­taine com­plai­sance voire auto­sa­tis­fac­tion même si tout est monté avec des dis­jonc­tions.
Cela n’empêche pas le jeu d’une dis­tinc­tion com­plai­sante vers l’effet du type : « la roue défaite aux vitres des pay­sages avec son sceau d’étoiles, ahh ▪ ». Sans comp­ter par­fois l’enduit du lyrisme lorsqu’il s’agit d’évoquer Lar­baud, Pes­soa, Chi­rico (et d’autres) ou les évo­ca­tions urbaines. L’auteur est plus per­ti­nent lorsqu’il retrouve plus de natu­rel et de sim­pli­cité. Le dyna­misme évo­ca­toire revient plus fran­che­ment lorsque, citant tout de même Pes­soa, l’auteur rap­pelle que « la vie ne suf­fit pas. »

Tout se passe comme si l’invitation au voyage était le seul moyen d’accéder à soi, ce qui reste — en par­tie au moins — dis­cu­table. Il est pos­sible de pré­fé­rer ceux qui se contentent tel Xavier de Maistre de « voyages autour de leur chambre ». Bref, les écri­vains voya­geurs ne font pas for­cé­ment la tasse de thé du lec­teur. Afin de trou­ver « des mor­ceaux d’autres villes, d’autres corps, d’autres voyages » le sta­tisme peut deve­nir un meilleur recours.
Rien n’empêche d’ailleurs à ce lec­teur d’effectuer des voyages immo­biles face à de tels dépla­ce­ments. Ils res­tent des pertes de temps. A Ulysse peut se pré­fé­rer sa tri­co­teuse close en son petit Lit­tré à la mode grecque. Les évo­ca­tions alam­bi­quées d’un exo­tisme qui feint de ne pas se recon­naître comme tel ne sert pas for­cé­ment à faire avan­cer le schmil­blick poé­tique. Et ce, par­fois selon une nomen­cla­ture qui quelque peu étouffe lec­teur : « ahh pen­ser D. José encore ver­die sa statue-cheval au centre de la place et Pes­soa le Mar­tinho da Arcada où il venait, ses habi­tudes comme à la Bra­si­leira… — photo d’avec Costa Bro­chado… rua dos Fan­quei­ros, Baixa et celle dos Douradores… ».

Le long réci­ta­tif réfé­ren­tiel finit par las­ser en excès d’arabesques et de laby­rinthes. La poé­sie se perd eu égard à un tel entas­se­ment de « frag­ments d’hier » ou d’aujourd’hui. L’auteur semble pré­fé­rer le pre­mier au second, qu’il soit en Angle­terre, en Ita­lie ou en Chine où l’« armée de Qin Shi Huang » fait mon­ter dans l’écriture du poète « équi­dés Cen­taures, Che­val de Troie ou Hyracotherium/ Eohip­pus… ». La cour est pleine.

jean-paul gavard-perret

Jean-Paul Bota, La bous­sole aux dires de l’éclair, Edi­tions Tara­buste, 2017.

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