Adepte des jeux entre le vrai et le faux, Véronique Bourgoin inventent des mises en scène de la nudité et de l’intime à travers créations ou documents d’emprunts. Emane de l’ensemble une déconstruction des images et de leurs propositions. Pour Véronique Bourgoin, il s’agit d’atteindre des lieux où le monde se transforme en fiction et la fiction en réalité. Il existe toujours une propension critique et la fabrique de contre-images permet d’empêcher la grande nuit de tomber sur notre perception et sur les représentations de la prétendue psyché. De telles propositions répondent au refus de rester dans la nuit « à jouer sous la lune au théâtre des ombres » comme écrit la créatrice.
Son travail — superbement mis à jour par Charlet Kugel qui travaille souvent avec l’artiste – permet de combattre le faux ou tout au moins de nous aider à faire un certain tri, avec souvent l’adjonction d’éléments épars disjoints sur les photos de base. Les images telles que les propose Véronique Bourgoin sont le contraire de ce que Lacan nomma des « re-pères mélancoliques », garantes de la répétition de la loi d’une interprétation à l’identique. Miroirs plus qu’étranges, mères incestueuses et vierges folles, elles ne cherchent pas à donner un réconfort aux croyances. Elles les tordent tant que faire se peut afin que nos représentations ne se paralysent plus. « Entre deux morts » (Lacan) l’artiste propose donc un réveil de l’esprit critique face à l’accumulation d’images médiatiques. Celles-ci n’offrent que des visions psychotiques des êtres et des choses contre lesquelles Véronique Bourgoin combat.
jean-paul gavard-perret
Véronique Bourgoin, Autoportrait pour tous, Texte de Charlet Kugel, Chez Higgins, Portfolio n°54 de la collection Erotica, 2015, Montreuil, 20,00 €.