JBP part à la découverte des chercheurs de l’expédition des Sept boules de cristal, une des aventures de Tintin, le petit reporter belge
Qu’on l’aime ou pas, Tintin, le petit reporter belge créé par Hergé, hante l’imaginaire de nombreux enfants de 7 à 77 ans. Avec L’Expédition Sanders-Hardmuth, le maintenant fameux JBP revient sur un des nombreux épisodes de la saga, je veux parler des Sept boules de cristal. Dans cet épisode, des chercheurs retour d’Amérique du Sud et du pays des Incas avec une momie, sous la houlette du professeur Bergamotte, ami de Tryphon Tournesol, compère lui-même de Tintin et du Capitaine Haddock, doté d’une surdité sans pareille, sont hospitalisés, tous victimes d’une léthargie profonde. La malédiction est là. Toutankhamon et son mythe aussi.
Soixante-deux ans après, cet épisode de Tintin ayant commencé à paraître dans le journal Le Soir, avant d’être fini puis publié en 1948, JBP revient sur le devenir de ces chercheurs de cette fameuse expédition dont on ne sait ce qui leur est arrivé. Tour à tour, Anton Sanders (1908–1961), Hippolyte Bergamotte (1893–1955), Jacques Clairmont (1905–1968), Félix Cantonneau (1898–1948), Marc Charlet (1900–1999), Armand Laubépin (1898–1953) et Bruce Hornet (1893–1983) voient leurs biographies scrupuleusement détaillées.
Y sont adjointes des bibliographies tout ce qu’il y a de plus factices qui sont d’une lecture jouissive par les nombreux JDM (jeux de mots) qu’y insère JBP. Si certains sont des private jokes, d’autres sont hautement accessibles. Tout y est touffu, jugez plutôt le début de la bibliographie d’Anton Sanders :
- Stoecker, l’exemple de la rigueur, de Irin Asp, éd. Dubois, Bâle 1954.
– Psycho-géographie du médicament : le cas Suisse, de Égic Asp, éd. Grorénal, Lorient 1973.
On y retrouve les fameux Irin Asp (Aspirine) et Égic Asp (Aspégic). Le premier est édité aux éditions Dubois chères à JBP (Scions du bois…) à Bâle (plus loin, JBP n’hésitera pas à faire un JDM des plus graveleux au sujet de cette ville que lui seul peut se permettre) et le second aux éditions Grorénal (ici, le lecteur lambda peut être perdu, hommage à l’ancien éditeur de la “Série Noire”, appelé “Le Gros”, aujourd’hui directeur de collection chez Fayard, j’ai nommé Patrick Raynal, Breton de son état, d’où la localisation de sa maison à Lorient…).
Le profane retrouvera de nombreux hommages. Francis Mizio est aux premières loges. Les JDM s’organisent selon une thématique rigoureuse. JBP n’est pas un adepte des littératures à contraintes pour rien. On découvre même des contraintes dans les contraintes. JBP n’hésite pas à faire se côtoyer la facilité et la recherche pure et dure. On finit ce livre la tête à l’envers. Chercher ces JDM tourne rapidement à l’obsession. Certains demeureront introuvables, avec la meilleure volonté du monde. Des fois, plus on s’échine à essayer de trouver, moins on trouve. Certains sont évidents pour certains lecteurs, d’autres pour d’autres. C’est donc un livre de partage. On se flagelle devant son aveuglement après que l’on nous a révélé un JDM pourtant hyper visible. Des fois, on quitte le livre en sentant que l’on a manqué quelque chose que l’on trouvera peut-être un jour. La piste se trouve sûrement dans un autre livre de JBP.
Que dire de plus sur cet ouvrage rafraîchissant et sans prétention autre que celle d’amuser son auteur et à travers lui ses lecteurs ? La maquette fait de ce livre un bel objet. Les Tintinophiles apprécieront la quatrième de couverture qui reprend celle des albums au fond bei(l)ge, l’intérieur au ciel étoilé et les deux premières vignettes en noir et blanc des Sept boules de cristal. Chaque sortie de chez ADK est un micro-événement mais qu’il ne faut pas rater sous peine de laisser passer une bonne occasion de se divertir.
julien vedrenne
Jean-Bernard Pouy, L’Expédition Sanders-Hardmuth, Antoine de Kerversau éditeur, mai 2005, 48 p. — 10,00 €. |
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