Sous l’égide implicite de Sollers qui fait mention d’un projet abandonné par Rimbaud où celui-ci aurait écrit “la véritable Histoire, littéralement et dans tous les sens”, Guillaume Basquin saisit la balle au bond pour créer un livre masse dont il définit le programme : “raconter de façon la plus polyphonique qui soit les desseins réels de l’Histoire”.
Et ce, sur plus de quarante siècles jusqu’à l’accident global du Covid. Cet “incident” tient plus de 80 pages finales dans ce corpus conçu en 5 épisodes.
Le livre prouve combien il est temps de lever la voix et le voile et comment le faire. La part la plus importante de livre est titrée “mille romans”. Elle rassemble un corpus majeurs de 1000 segments. Ils introduisent de la pensée dans la littérature postmoderne qui en manque cruellement.
De même que le “Au commencement” qui ouvre le livre dans un texte confession magistral qui n’est pas sans rappeler le “paradis” de Sollers.
En libre parcours entre fiction et imaginaire, Basquin écrit pour rattraper ce qui lui échappe. Il fait de son livre comme le demande Novarina “un exercice d’idiotie”. Le tout programmée par une intelligence et un savoir qu’il s’agit de jeter aux orties afin que le texte devienne un champ d’action de force vive.
Se retrouvent le familier et l’étrange, la force des choses et le hasard, la rue et l’art, la douche et le bronzage. Bref, le texte devient de la méditation philosophique et de la fiction poétique. L’auteur y émet des prolégomènes face aux conneries aux morts et devant les sonneries aux morts.
Mais, quoiqu’en dise Basquin, ses “conciliabules” ne se limitent pas à exorciser ses propres cauchemars. Il y va de la vie du monde et de ses avatars là où l’écriture détourne ou dissuade de toute assise. La seule issue reste d’écrire en portant à faux et en emportant la possibilité du fondamental.
Car ce qui est trahi par l’écriture, c’est l’écriture même — flèche visant le vide, tombant toujours trop tôt ou trop tard. Mais qui permet à tout discours de se poursuivre.
jean-paul gavard-perret
Guillaume Basquin, L’Histoire splendide, Tinbad Chant, Editions Tinbad, Paris, 2022, 344 p. — 23,00 €.
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