Philippe Jaffeux poursuit ses mouvements qui déplacent les lignes.
Il ne se contente pas d’écrire mais, tel un post-lettriste, il propose pour illustrer ses thèmes (Little Richard, John Coltrane, Le Sacre du Printemps, Bach ou Cab Calloway et bien d’autres) des rythmes qui — par leurs cardages, courbes, creux, caviardages, carrelures — créent un souffle particulier.
Le texte est non hors texte mais dans “de” l’image. Il est ainsi dérobé au sens univoque et désormais ouvert.
Chaque sujet est épousé de plus près : pour Coltrane par exemple, une seule phrase épouse le souffle du jazzman.
Parfois, l’image est proprement illustrative (“xylophone”) mais le plus souvent elle rentre en profondeur dans le texte visible à travers elle.
Voici sans doute pourquoi un carpe diem hors nostalgie danse la où la musique est rendue à elle-même.
Ni statique, ni funèbre. Elle devient l’élue qui échappe à la pure abstraction — qui fait selon Schopenhauer sa marque de fabrique — par une telle matérialité.
jean-paul gavard-perret
Philippe Jaffeux, Pages, Editions Plaine Page, coll. Calepins, Barjols, 2020, 56 p. — 10,00 €.