Rien ne sert d’écrire avec logique classique l’érotisme, la nature où le regard qu’on porte sur eux sinon à dupliquer du même. C’est pourquoi ce voyage en ce « val joyeux » crée des accrocs et des déplacements de sens : « puisqu’il faut rendre à César je suis en bas je suis sur le sentier au dehors de la maison comme vous je regarde la fenêtre qui regarde la mer longtemps ouverte ». Existe donc tout un déplacement d’optique.
L’expression sépare de l’ordre naturel afin d’accompagner l’insaisissable, le souligner comme le font, en peinture, les tableaux — enfin ceux qui ne se limitent pas à la simple représentation.
Existe ici une vue de l’esprit. Elle est toute en profondeur afin de ne jamais retomber sur du pareil ou du même. Ecrire n’est pas superposable à la réalité. Une séparation demeure. Un espace inédit jaillit des espaces communs. Bref, aucune intégrale. L’écriture n’appartient pas au domaine concret. Du moins pas en totalité. Mais elle apporte une dimension additionnelle. C’est d’ailleurs sa seule raison d’être.
Si bien qu’ « en arche au-dessus du portail il y aura tes yeux contemplatifs et pleins d’eau qui comme à chaque marée regardent d’un œil nouveau éclore les fleurs et battre la petite houle il y aura d’autres paysages puissent-ils être aussi changeants et lumineux aussi imprévisibles chaque matin devant nos corps ». L’écriture litanique en ses volutes s’enfonce dans les circuits de plaisir mêlés de doute. L’élan vient battre, comme la marée montante, un empêchement. Et ce dernier, l’écriture le prend par défaut.
La poétesse renouvelle les fondamentaux du récit et de l’évocation par la transformation des règles de la composition et la capacité de l’imaginaire à conjuguer le monde tel qu’il est pour mieux dégommer les poncifs picturaux et paysagers. Ils deviennent des bas-reliefs abyssaux au sein de ce qui pourrait sembler bien sage.
jean-paul gavard-perret
Julie Quéré, Le val joyeux, Derrière la Salle de Bains, Maison Dagoit, Rouen, 2018 — 5,00 €.
Brillantissime relief …