Dominique Sigaud, Dans nos langues

Prendre langue, prendre vie

Le récit de Domi­nique Sigaud devient une étude de soi loin de la simple auto­fic­tion. L’auteure confronte à un fait majeur : com­ment les langues ont prise sur nous. Celle qui nous est don­née mais en même temps celle que les adultes refusent lorsqu’ils jouent le jeu social, celle qui se veut maî­tresse en étant pater­nelle et qui, de fait, devient la gram­maire des tra­hi­sons.
L’auteure pour autant ne règle pas ses comptes. Au grand “lâchez tout !”, elle pré­fère une com­bus­tion intime (mais aux mots de gri­sou) pour don­ner chair et charge aux remon­tées d’abîmes. Et ce, parce qu’il exis­tait chez la petite fille puis demeure chez la femme qu’elle est deve­nue un feu dans les brous­sailles insou­mises de son être.

Pas besoin dès lors d’en faire des tonnes. Les lentes pul­sa­tions d’une langue deve­nue sienne émettent leur magné­tisme au soleil rouge du coeur, si bien que les masques fondent presque d’eux-mêmes. Domi­nique Sigaud n’a plus qu’à les sor­tir de la nuit.
Il arrive même que leurs avis de détresse tiennent presque d’un sou­rire sinon amusé du moins dis­tant. Celui d’une poli­tesse qu’on n’a pas tou­jours accor­dée à une auteur raris­sime qui la mérite. Les femmes dans son métier de jour­na­liste de guerre n’étant pas trai­tées de la même onc­tion que leurs col­lèges mas­cu­lins. L’auteure sait néan­moins tou­jours gagner de la hau­teur par les pré­ci­pices qu’elle a dû enjam­ber. Son livre fait bien plus que le prouver.

jean-paul gavard-perret

Domi­nique Sigaud, Dans nos langues, Ver­dier, 2018, 144 p. — 14,80 €.

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