Soudain Tokyo n’est plus exil. Dominique Servonnat y marche exaltée par la découverte, insoucieuse des lieux où la conduit son errance. Se perdre dans la ville, c’est abandonner derrière soi des dépouilles, se réorienter. Se redresser, passer des murailles qui ne sont pas de Chine mais de plus loin encore. Tokyo c’est des paysages et des êtres semblables à nous. Ils se hâtent dans la ville en épuisant leurs forces. Comme nous. Avec des savoirs confus et des conflits divers.
Mais se rendre si loin, chez eux, c’est parvenir à clarifier les nôtres. Quand le monde s’éloigne, l’œil est transformé, il s’épure, se fertilise.
Dominique Servonnat confie au sien sa passion de la connaissance de l’autre. Elle embrasse la ville : l’œil qui s’est transmuté et s’est désencombré affronte l’insondable. Les heures du jour s’égrainent, la photographe s’y engage trouvant là le désir de voir. De voir et d’être dans l’immense cité. La douce lumière du jour, celle plus violente des grandes affiches électroniques, submerge : de l’âme vacante ne subsiste que le désir de comprendre et de s’enivrer par la pérégrination de l’inconnu.
L’éloignement devient le jeu d’une particulière proximité.
jean-paul gavard-perret
Dominique Servonnat, Tokyo Day, Editions Corridor Elephant, Paris, 2017.
Je remercie Jean Paul Gavard– Perret pour ce très bel article.