Alain Wexler est précis, entre autres sur un point : « Quand l’homme ne trouve pas de fruits dans l’arbre / Il les cueille sur l’échelle ». Mais celle-ci ne s’arrête pas forcément en si bon chemin. Elle gravit parfois les cieux pour y attraper des mots. D’échelle sur le toit elle se transforme en celle de Richter ou de Jacob. Ayant atteint leur cime, les mots s’y gobent tels « des œufs entre les dents ».
Tout est donc fait ici afin de créer cette fameuse « poésie verticale » chère à Juarroz. La femme y fait grimper l’homme tel un drôle d’oiseau. Il y est question d’enjambements plus ou moins voluptueux lorsqu’il s’agit autant de grimper aux barreaux qu’au rideau. Au besoin ceux d’une chaise de paille peuvent faire l’affaire. Mais l’échelle reste le moyen idéal d’escalader l’arbre de vie de notre vide.
C’est prendre le large en choisissant la hauteur. Nous y grimpons ou y descendons sans peur du vertige afin parfois d’y vivre l’amour « au-dessus de ses moyens » et de mourir plus haut que notre niveau d’inconduite notoire auprès de celles qui font monter la fièvre. Surtout lorsqu’elles cultivent une certaine hauteur pour tout laveur de vitre que reste à sa manière le poète.
Les exercices de « gravitude » de l’un sont semblables à ceux de l’autre. Et souvent les deux retombent sur leur postérieur après s’être fait bien des frayeurs.
jean-paul gavard-perret
Alain Wexler, Echelles, Les écrits du Nord, éditions Henry, Montreuil sur Mer, 2017.