Lucie Linder impose l’identité féminine dans sa profondeur. Le “qui je suis” et le “si je suis” de la femme s’imposent sans langue de bois. S’inscrit une avancée subtile en une économie particulière. Un tissu précaire, souple, délicat apparaît. En dessous palpite une chair que l’on ne connaît pas ou trop mal. Il faut alors aller la chercher chaque fois un peu plus loin dans les images de la créatrice. Celle-ci évacue par ses travaux ceux qui biffent ou immobilisent la femme en ce qui tient de répétitions. L’artiste lutte conte l’illusion de l’apparence et les effets de miroir. Elle suggère ainsi un certain sentiment extatique de la vie. Sa poésie visuelle reste l’« erreur essentielle » qui donne par ses images « voix » au silence du féminin et en affronte le secret.
Entretien :
Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
La liberté
Que sont devenus vos rêves d’enfant ?
Ils nourrissent ma créativité
A quoi avez-vous renoncé ?
D’être proche de ma famille et de certains amis
D’où venez-vous ?
De Lorraine.
Qu’avez-vous reçu en dot ?
Le soutien de mes parents dans ma voie artistique
Un petit plaisir — quotidien ou non ?
Le chocolat noir
Qu’est-ce qui vous distingue des autres artistes ?
Ma timidité?
Comment définiriez-vous votre approche du corps féminin ?
J’ai une forme de fascination pour le corps féminin. Parce qu’il aspire à l’érotisme et au désir mais aussi à une forme de brutalité. Ce corps garde la trace de différents passages, l’enfance, l’adolescence, l’âge adulte.Sa part d’animalité me semble essentielle à l’encontre des idéaux de beauté civilisés. On doit le saisir au plus proche de sa matière, comme la caresse des poils d’une créature. Cette approche est une façon d’ouvrir l’intimité à l’imaginaire.
Quelle est la première image qui vous interpella ?
L’image d’une chimère
Et votre première lecture ?
Je ne m’en souviens pas
Quelles musiques écoutez-vous ?
Des groupes undergrounds, rock, punk, electro, new wave, showgaze, krautrock.
Quel est le livre que vous aimez relire ?
« Le livre de l’intranquilité »de Fernando Pessoa
Quel film vous fait pleurer ?
« Les chansons d’amours » de Christophe Honoré
Quand vous vous regardez dans un miroir qui voyez-vous ?
Plusieurs personnes en une seule.
A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
A des galeristes
Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
Etretat en Normandie
Quels sont les artistes et écrivains dont vous vous sentez le plus proche ?
Très brièvement, Dorothée Smith, Françoise Pétrovitch, Claire Tabouret, Karine Rougier, Rachel Labastie, Bill Viola, Olivier Cadiot, Fernando Pessoa
Qu’aimeriez-vous recevoir pour votre anniversaire ?
Un écran calibré
Que défendez-vous ?
L’écologie
Que vous inspire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est donner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
Une vérité mélancolique crée quelque chose qui n’existe pas pour personne.
Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la question ?“
Que parfois il faut savoir dire non
Quelle question ai-je oublié de vous poser ?
Voulez-vous danser ?
Présentation et entretien réalisés par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com, le 19 mars 2017.