Maurizio Cattelan, Seasons (exposition)

Maurizio Cattelan, Seasons (exposition)

L’exposition Saisons de Maurizio Cattelan devient un voyage visuel à travers la ville de Bergame. L’objectif: stimuler une réflexion sur la nature cyclique de la vie et de l’histoire, sur les générations, sur l’essor et le déclin des valeurs et sur les transformations de l’individu et de la société.
Le titre de l’exposition est une référence claire aux saisons, symboles universels de passage et de renouvellement : une invitation à réfléchir sur le devenir du temps, mais aussi une exhortation à faire l’expérience de la réalité dans sa complexité et du drame à travers l’art, qui ne se limite pas à représenter le monde, mais l’interprète, le problématise et le transforme.

La troisième œuvre intitulé Non (2021), exposée dans les salles du musée, est issue de la refonte de la sculpture iconique Him (2001), dans laquelle Maurizio Cattelan représentait Adolf Hitler agenouillé en prière, le visage tourné vers le haut dans un geste ambigu, entre supplication et fiction. La figure, modelée avec des traits enfantins, évoque au premier coup d’œil l’image innocente d’un enfant, générant un court-circuit visuel et émotionnel lorsque le spectateur reconnaît l’identité du sujet.

Le choix de se couvrir le visage – déclenché par une demande de censure à l’occasion d’une exposition en Chine – est ambigu : il s’agit à la fois d’une forme de punition et de protection. Protection du spectateur contre le traumatisme, mais aussi du sujet contre le jugement. Ainsi, le Non interrompt le circuit de la reconnaissance visuelle, niant au visage la possibilité de devenir une icône. La dissimulation devient le pivot de l’œuvre : le sac n’est pas seulement un acte de censure, mais un dispositif qui déplace l’attention sur ce qui n’est pas montré, qui devient plus dérangeant que ce qui est vu.

Dans la Sala delle Capriate, November est une sculpture qui stimule une réflexion sur notre rapport à la marginalité, à la justice, à la décadence, mais aussi sur le sentiment de liberté que, parfois, les plus faibles et les plus vulnérables peuvent incarner. Réalisée en marbre statuaire de Michel-Ange, la sculpture représente un sans-abri allongé sur un banc, le pantalon détaché, dans un moment d’extrême vulnérabilité. L’homme urine sur lui-même, comme en témoigne la présence d’eau sur le sol, un détail qui non seulement amplifie la dimension de réalisme de la sculpture, mais accentue également le sentiment de malaise, d’éloignement des normes socialement partagées et d’étrangeté. Le visage du sans-abri est celui de Lucio, un ami et collaborateur de longue date de Maurizio Cattelan. Un hommage qui introduit une dimension intime dans l’œuvre, mettant en évidence le lien entre l’artiste et son sujet, mais aussi le thème universel de la marginalité sociale.

Avec l’installation One, sur les épaules de Garibaldi, Cattelan place un enfant qui, des doigts de sa main droite, mime un pistolet : un geste ambigu qui oscille entre le jeu enfantin et un soupçon d’affirmation, de résistance ou de rébellion potentielle, mais qui peut aussi être lu comme une tentative d’interroger les responsabilités des nouvelles générations face à la mémoire et aux contradictions de l’histoire. D’une part, il s’agit d’une intervention qui stimule une comparaison avec le passé national ; de l’autre, il raconte la relation entre les générations.

Dans ce contexte, Cattelan semble suggérer combien il est important de ne pas oublier l’histoire, mais plus encore de savoir la relire et l’interpréter. Le créateur propose une réflexion ouverte sur ce que signifie aujourd’hui être les héritiers des valeurs et des idéologies qui ont construit une nation, et nous invite à réfléchir sur le type d’« unité » qui est encore possible. Une coexistence faite de différences, de mémoire critique et de nouvelles possibilités. En ce sens, l’œuvre est à la fois monument et contre-monument, geste de continuité et acte de rejet.

Maurizio Cattelan, Seasons, Bergame, Du 7 juin au 26 octobre 2025.

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