Gérard Macé, Ici on consulte le destin

Gérard Macé, Ici on consulte le destin

Le principe du disque rayé

La matière des rêves est toujours une tentation pour les poètes. Ils y trouvent de quoi résoudre les énigmes du réel. Si bien que le temps du songe est repris par celui de l’éveil dans une sorte de neutralisation de l’espace-temps sans pour autant glisser dans un ésotérisme appuyé.
C’est une manière de reprendre différentes « matières » : celles des rêves mais aussi de souvenirs de différentes natures.

Les poèmes réunissent diverses expériences mentales et psychiques dans un dialogue de l’auteur avec lui-même entre réalités et fables ou mythes qui nourrissent tout imaginaire. L’auteur le rappelle en ressuscitant les cercles de divers temps et lieux d’autant que les courbes diurnes et nocturnes de sa propre histoire répètent des « comédies » d’autres hémisphères du temps.
Dans ses poèmes à la construction subtile, l’auteur fait preuve de clarté et discipline pour donner une expression à son imagination créatrice qui vient au besoin mettre à mal les hantises actuelles des humanoïdes.

Macé sort des sentiers battus pour nous apprendre qu’il existe des sortes de vérités qui n’offrent pas de stabilité – du moins celle que la rationalité caresse. A cette aune, le kantisme et autres philosophies du même tabac sont des quant-à-soi. Et Macé rappelle qu’on n’a pas simplement besoin de raison pour (se) connaître. Il faut remonter plus haut que sa béance et pénétrer les trous du logos.
D’où le fait que, comme tous les grands poètes, l’auteur tente de reconstruire l’ordre du monde, des choses et donc de lui-même par le regard qu’il porte sur son enfance, ses rêves et ses savoirs. Si bien que ce texte est rare. Tout y chante mais selon le principe de la boucle ou du disque rayé. Le bug existentiel ne nous y quitte pas. Que reste-t-il sinon se laisser envahir par tout ce qui n’est pas qu’une musique mais lui ressemble ?

Plus besoin de retapisser le temps : pièce après pièce, juste tirer aux forceps ce qui en ressort dans une écriture sans pathos et une projection fantasmée du monde en ses rites et ses fables tirés de bien des « calendriers ». Ils permettent l’accès à bien des royaumes là où le poète cherche – dans un post-surréalisme – à résoudre les contradictions du réel entre façon d’être éveillé ou endormi là où penser ne revient pas à fixer mais à corriger ce que la raison seule ne pourrait que laisser échapper.

jean-paul gavard-perret

Gérard Macé, Ici on consulte le destin, Le Bruit du temps, Gouville sur mer, 2021, 88 p. – 16,00 €.

One thought on “Gérard Macé, Ici on consulte le destin

  1. La petite musique de l’enfance bourdonne toujours en backstage et JPGP analyse Macé avec pertinence :  » l’auteur tente de recons­truire l’ordre du monde, des choses et donc de lui-même par le regard qu’il porte sur son enfance, ses rêves et ses savoirs. Si bien que ce texte est rare.  » YES !

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