
Caroline Hoctan entre alliance et allusion – entretien avec l’auteure (La Fabrication du Réel)
Photographie © Isabelle Rozenbaum
Pour une telle créatrice, son nouveau roman d’aventure tisse un fil de l’Histoire de ses racines et de la posthistoire pour dénouer tous les nœuds œdipiens (et autres) de toute prétendue vérité du réel. Face à la réalité, les questions inhérentes à cette fiction de Caroline Hoctan découvrent l’ouverture du doute, la nuit du monde et celle d’un advenir à soi.
Dès lors, la matière de penser crée l’ écriture qui lui donne corps. Et en conséquence, le roman forge contre le réalisme la capacité de mouvements et un processus nomade de réseaux. Articulant l’intrigue quasi d’espionnage et le roman à thèse, l’auteure invente la « défection » et l’« affection » autant que la fiction du réel. Le héros reste un otage ou un insituable entre l’immobilisme et l’impossible appartenance de son état. Est-il l’écarté, l’incertain entre hier et demain et l’ici dans l’ailleurs ? C’est l’invention originale d’une telle auteure là où tout se charpente entre l’alliance à l’allusion.
De Caroline Hoctan, La Fabrication du Réel, Tinbad, coll. Roman, Paris, 2025, 266 p. – 23,00 €.
Entretien :
Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Mon désir de lire et d’écrire.
Que sont devenus vos rêves d’enfant ?
Je n’en ai jamais eus.
À quoi avez-vous renoncé ?
J’ai renoncé depuis longtemps à tout, sinon lire et écrire.
D’où venez-vous ?
Pour le coup, de nulle part au sens propre du terme.
Qu’avez-vous reçu en « héritage » ?
Un imbroglio familial.
Un petit plaisir – quotidien ou non ?
Plusieurs même !
Comment définissez-vous votre approche du monde ?
Pragmatiste.
Quelle est la première image qui vous interpella ?
Une hallucination.
Et votre première lecture ?
Le Journal de Kafka.
Quelles musiques écoutez-vous ?
Du Downtempo, du Rap, du Nu Jazz, du Handpan…
Quel est le livre que vous aimez relire ?
« D’où viens-tu Hawthorne ? » de Herman Melville.
Quel film vous fait pleurer ?
« Point Limite » de Sidney Lumet.
Quand vous vous regardez dans un miroir qui voyez-vous ?
L’autre en soi.
À qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
À moi-même.
Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
New York.
Quels sont les artistes et écrivains dont vous vous sentez la plus proche ?
Tous les Américains du Sud et du Nord, la plupart des Asiatiques, certains Européens, une infime poignée de Français.
Qu’aimeriez-vous recevoir pour votre anniversaire ?
Un livre, mais pas n’importe lequel.
Que défendez-vous ?
La vraie vie, les liens invisibles, la persistance de l’être.
Que vous inspire la phrase de Lacan : « L’Amour, c’est donner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas » ?
Elle ne m’inspire rien, car je pense que l’amour n’est pas une aptitude à négocier, mais à vivre.
Que pensez-vous de celle de W. Allen : « La réponse est oui, mais quelle était la question ? »
Seule compte la question, peu importe la réponse, donc je n’en pense rien non plus.
Quelle question ai-je oublié de vous poser ?
Pourquoi répondez-vous à mes questions ?
Entretien et présentation réalisés par jean-paul gavard-perret, pour lelitteraire.com, le 4 mars 2025.