C’est le désarroi qui fait écrire Sandrine-Malika Charlemagne. Celui des perdus et le sien. Car elle a connu elle aussi les jour blafards, d’une cage d’escalier où passer la nuit, “au dernier étage à l’abri des regards”. Elle a vécu les petits matin dans la ville animée déjà par les pas sourds des travailleurs.
Elle a connu aussi dans sa propre existence l’amour subit qui “fige dans son plus foudroyant élan” où elle s’est abandonnée, captive et consentante. Dévorée aussi avec “son collier d’or / Autour du cou – l’éternité et un jour”.
Il y a là des longs voyages sans aucun retour. Mais l’auteure, plus que transcrire le réel, veut le transfigurer. Pour preuve, elle fouille certaines images afin d’en préserver la quintessence défaite et d’en sublimer le souvenir. Souvent en solitaire sur un chemin obscurci, elle rameute “mille et une parcelles “, des sensations, images, rencontres, voix, visages et tout ce qu’on peut imaginer pour aller plus loin.
Le tout au nom aussi de Marguerite Duras, Violette Leduc, Pasolini, Genet, Guyotat, Musil mais la liste est non exhaustive.
Restent des nuits constellées rattrapées au vol avec quelques mots d’histoire contre la destruction. Certes, l’auteure sait que l’homme détruit l’homme, et le détruira toujours. Mais contre l’ignominie, sa métisse veut renaître là où ses cris furent “baptisés par un tourbillon de sable puis les grands espaces bétonné”.
lire notre entretien avec l’auteure
jean-paul gavard-perret
Sandrine-Malika Charlemagne, La petite ouvrière métisse, Editions La Rumeur Libre, coll. “Un poète, un livre », 2022, 72 p.