Gil Rigoulet sait que la photographie n’est pas une idée abstraite mais le langage de l’amour. Et pour en parfaire la pure dépense et faire parler son silence, le langage de la nudité n’a rien de coupable ou de criminel bien au contraire. C’est même ici par où tout passe.
Et chaque prise naît moins d’agitations excessives que de la peur que l’amour parte trop vite. Ce que — de fait — les images annoncent ici par leurs jeux avec les négatifs et leurs visions de dos.
Mais plutôt que de hausser les épaule, le photographe va le plus loin possible dans l’expérience amoureuse et photographique. Son appareil se fond dans les jours et l’intimité. L’aimée provisoire ne prête pas attention aux photos,
Et le créateur, dans le silence, précise qu’il ne pense pas : “ma tête cadre, voit, tout est si fragile, fugace, comme si le cœur était dans les yeux”. C’est ce qui donne un peu d’éternité non au sentiment mais au style.
D’où ces fragments d’un amour ni long ni fatal. Qui se contente de suivre un temps son parcours auquel Rigoulet accorde une présence sensuelle. Il abandonne les lubies des hommes qui s’estiment glorieux. Pour sa part, il “oblige” celle qui un temps lui permet d’aller à l’encontre du terre-à-terre et des vérités humiliantes.
Ils ignorent ce qui va arriver mais le discours amoureux s’en joue. Son feu ici peut avoir le dernier mot qu’il n’a pas dans la vie.
jean-paul gavard-perret
Gil Rigoulet, Esquisse. Silence, éditions The (M), 2023, 88 p. — 180,00 €.
Délicieuse ” ESQUISSE” d’un brillant photographe qui a effectivement ” Le cœur dans les yeux ” et d’un critique pertinent qui met en lumière l’intimité de l’artiste .