Le plus étrange est que l’éditeur, qu’on a connu plus inspiré, ait publié cette daube
Le voilà donc le livre dont tout le monde parle sans l’avoir lu. Mme Iacub, pour payer ses impôts, a décidé de raconter son amourette avec un porc. Un porc qu’elle ne nomme jamais mais qu’on reconnaît sans peine : un homme riche puissant, inculte, gros et laid et qui ne jouit que quand il met sa langue tout au fond de l’oreille de Mme Iacub : il a une langue à la Rocco Siffredi. Ou quand il la démaquille en gobant son mascara. La gastronomie à la portée des caniches. Un cochon qu’elle distingue de l’homme qu’il y a en lui, à moins que ce ne soit le contraire : l’homme est nul mais le cochon est sublime. Elle méprise l’homme mais aime le cochon.
Le but, aujourd’hui, n’est plus d’enrichir la littérature mais de faire ce qu’on qualifie de ce mot ridicule de « buzz ». Dès lors que l’écriture n’a plus pour objectif la recherche du beau mais la recherche du bruit, qu’elle n’a plus pour but la quête du Graal mais la quête du gras, on peut craindre le pire dans ce qui n’est plus qu’une course au pognon. Le livre de Mme Iacub n’a aucun intérêt en soi et si le personnage principal mâle n’était pas ce protagoniste adipeux qu’elle décrit et qu’elle ne nomme jamais, personne ne l’aurait acheté. Elle a d’ailleurs si peu confiance en son talent descriptif qu’elle a dû craindre qu’on ne le reconnaisse pas et qu’elle a laissé un hebdomadaire révéler son nom.
Pour séduire Mme Iacub, le roi des porcs lui a lâché cette phrase : « J’aimerais vous lécher les paupières, vous enlever votre mascara et l’avaler d’un coup ». Étrange d’avoir envie d’une aventure avec un homme qui se rêve coton à démaquiller. Le pire est qu’il se jette sur elle à la première occasion et passe à l’acte. Quel manque de goût ! Il y a tant de choses merveilleuses chez une femme à préférer à son mascara. Et on imaginait le cochon amateur de putes ; non, il baise à l’œil. « Tu t’es jeté sur moi sans dire un mot. (…) Tu as sorti ta langue dont la longueur m’a effarée et tu t’es mis à me lécher les paupières. Tu ne t’arrêtais pas, tu m’enlevais le mascara, le fard à paupières, le khôl, et tu l’avalais ». Quand on pense que Mitterrand n’a jamais su qu’on pouvait avaler le Kohl pour faire le rot, c’est rageant.
Leur premier contact est d’ailleurs fructueux ; elle le résume bien (p.33) « J’étais dégoûtée de cette rencontre ». Mais elle aime le cochon et elle a un livre à écrire, alors elle remet le couvert mais le cochon manque d’imagination et il s’aventure plus loin avec sa juriste-essayiste : après l’œil, il la baise à l’oreille et devient coton-tige. « Tu as mis ta langue à l’intérieur et tu as commencé à avancer. J’ignorais que l’on pouvait aller si loin à l’intérieur d’une oreille, que les oreilles n’avaient pas de fond (…). Puis tu as enlevé ta langue et tu as mis ton énorme doigt dans le trou de mon oreille, tu l’as enfoncé de plus en plus loin. Je sentais que tu avais touché mon cerveau ». Tout s’explique !
La fin du torchon part en jus de boudin : ce doit être le lot du cochon. D’ennuyeux, le livre devient grotesque : le cochon se mue en japonais cannibale. Et tout est si mal écrit… Mme Iacub est capable de livrer des chroniques à Libération fort bien troussées, pourquoi donc a-t-elle bâclé son dernier opus ?
« C’était eux que tu abusais que tu humiliais, et non pas les putes pour qui baiser contre de l’argent constitue le métier ».
« Mais toi, toi aussi tu as eu tort et cela je le savais aussi. Non pas pour les mêmes raisons, certes ». Est-ce par mimétisme qu’elle écrit comme un cochon ? A moins que les éditions Stock n’aient licencié leur correctrice, ou qu’il n’y ait du coke en Stock.
Le plus étrange est que l’éditeur, qu’on a connu plus inspiré, ait publié cette daube. S’il l’a lu il a dû être consterné. Selon des fuites savamment organisées dans la presse, il aurait trouvé le livre nul et conseillé à son auteur : – Tu n’as qu’à dire qu’il s’agit de DSK ! Ce qui fut aussitôt fait et on s’arrache cet opus-cul. Cul … et encore : « (ta femme) aurait trouvé ta liaison avec moi bien plus grave que les partouzes avec des putes même si nous ne couchions pas ». Tout ça pour ça.
Quant aux pseudo-intellectuels qui ont encensé le livre de Mme Iacub, elle les remercie par avance (p.21) : « L’intellectuel est un malade, un être méchant. S’il a un désir, il préférera le retarder pour être sûr qu’il ne ressentira plus rien lorsqu’il s’autorisera à l’assouvir. (…) Parce qu’il aime se faire du mal. Parce qu’il aime détruire tout ce qui le sort de la nuit interminable dans laquelle il vit ». Voilà donc comment elle voit ses zélateurs. Cochon qui s’ébaudit ! Son prochain livre, elle devrait le publier aux éditions Justin Bridou.
fabrice del dingo
Marcela Iacub, Belle et bête, Stock, 203, 128 p. — 13,50 €;