Un poète pour universitaires ?
C‘est en 1948 que Joë Bousquet écrit pour la revue « Les Lettres » une étude ou plutôt un brûlot où l’auteur passe de l’admiration à la haine face à celui qu’il nomme “le sorcier de Tournon”.
Certes, le sacripant du quartier Saint Lazare résiste. Il n’empêche : l’auteur dézingue l’idole et réduit à néant les prétentions du maître.
Il devient le maudit et les nombreuses notes et variantes inédites issues des brouillons manuscrits ne modifient en rien la diatribe. Au contraire.
Et Bousquet quitte un certain empyrée pour travailler à l’acide son portrait.
En rien avide de dévotion, il devient un hérétique pourfendeur afin d’inoculer à Mallarmé la peste pour étreindre ses feux poétiques.
L’auteur en est réduit aux acquets : à savoir poète pour universitaires.
Le texte est admirablement injuste et c’est ce qui ravit. Nous pouvons l’apprécier sans rien retirer au génie de celui qui est transformé ici en artefact.
Mais sa lumière demeure parmi de telles ombres délicieusement oppressantes.
jean-paul gavard-perret
Joë Bousquet, Mallarmé le sorcier, Préface de Jean Frémon, Portraits de Joë Bousquet par Pierre Cabanne, Fata Morgana, Fontfroide le Haut, 2021, 56 p. – 13,00 €.