L’exaspération des figurations
Natacha Lesueur subvertit bien des injonctions à la beauté, la jeunesse, la minceur, et les astreintes sociales et culturelles dont sont victimes — parfois consentantes mais souvent forcées — les femmes.
Sous la direction de Christian Bernard, l’exposition rétrospective à Rome permet de dépasser le champ du médium photographique où l’artiste est maîtresse pour explorer d’autres aspects de sa production artistique : sculptures-fontaines en céramique, vases en faïence, dessins et œuvres vidéo.
Tout devient une manière d’interroger l’expérience de l’image et la fixité des formes. Que le titre de l’exposition fasse référence à Virginia Woolf n’est pas anodin. Et plus particulièrement à son livre Une chambre à soi où l’anglaise citait elle même Nick Greene et Samuel Johnson. Pour ces compères, une femme qui joue la comédie, prêche, compose, bref qui exerce toute activité intellectuelle, leur fait penser à un chien qui danse : “le résultat n’est pas probant mais on est surpris que ça existe “.
Exit ici la douce Kate, oui Kathy la cruelle par l’exaspération des figurations, les éclatements des cercles viciés faites pour la satisfaction de porcs rarement épiques quoique épicuriens. Restent sous les falbalas les plis du coeur, les déchirures de l’âme.
Natacha Lesueur crée un appel à la résistance des femmes. Elles ne doivent pas se laisser absorber d’une vision qui ne leur appartient pas et qui les couvre d’onguent des tigres.
C’est pourquoi chaque silhouette qui affleure reste séparée du monde.
jean-paul gavard-perret
Natacha Lesueur, Comme un chien qui danse, Villa Médicis, Rome, du 13 octobre 2021 au 9 janvier 2022.
Catalogue de l’exposition : “éditions Walden n”.