Magicienne du silence des tréfonds de la psyché, Odile Cohen-Abbas crée un mixage de qui nous sommes : “des êtres hybrides” aux “distorsions angéliques, diaboliques”.
Le tout dans un jeu de miroir, de focale et d’angles selon des prises autant de vues que de mots.
S’instruit tout un jeu amoureux et une lutte là où les êtres eux-mêmes se dédoublent en divers Gilles et Pierrot par une mise à feu de la vie dans les pans des peintures abstraites d’Alain Breton.
D’où cette “geste” et sa chanson habitée et inspirée. Elle est nourrie d’un savoir ancestral mais tout autant moderne.
Les mots semblent assurer l’existence à cette histoire somme toute de sexe, en dépit des courants mystiques.
La chair ruisselle en un cantique des cantiques avant que la créatrice retourne son encre comme Godard retournait sa caméra dans un de ses livres les plus célèbres.
Odile Cohen-Abbas joue d’une perversion secrète dans une transmutation des lieux et des êtres entre trivialité et spiritualité. Etre embrigadé dans le terrestre charnel ne suffit pas à s’enkyster en ce qui est.
La poésie devient une source naturelle qui permet aux êtres, non de plonger en des abîmes, mais de monter au ciel là où s’inscrit une condition “ciné” qua non de reprise de vie.
Les mots de la tribu la recréent.
jean-paul gavard-perret
Odile Cohen-Abbas, La Maison des gestes, Les Hommes sans Epaules, Paris, 2021, 120 p. — 20,00 €.