Patrice Buendia & Gilles Laplagne, Médecins de guerre – t.01 : “Ligne de vie”

Au cœur de com­man­dos parachutistes

En rete­nant pour per­son­nage prin­ci­pal un méde­cin, dont la mis­sion essen­tielle est de sau­ver des vies, en le pla­çant dans un conflit armé, le scé­na­riste pro­pose un angle inté­res­sant pour son his­toire. Mais, en pre­nant une héroïne, il rajoute une couche sup­plé­men­taire avec l’intégration d’une femme dans un groupe mas­cu­lin fermé. Cette situa­tion offre de très nom­breuses pos­si­bi­li­tés au point de vue scé­na­ris­tiques car le contexte est riche.
Cepen­dant, les femmes sont de plus en plus nom­breuses dans l’armée et le SSA — Ser­vice de Santé des Armées — est un exemple de fémi­ni­sa­tion avec plus des deux tiers des effec­tifs et une petite moi­tié déployée en opé­ra­tions exté­rieures. C’est donc ici la des­crip­tion du quo­ti­dien d’une méde­cin mili­taire. Mais pour elle, c’est d’autant plus dif­fi­cile car elle doit mon­trer qu’elle est aussi forte et aussi capable qu’un homme.

Trinh N’Guyen s’est enga­gée pour deve­nir méde­cin mili­taire parce que ses parents, fuyant la dic­ta­ture viet­na­mienne sur un boat-people, ont été sau­vés par des mili­taires fran­çais. Elle sort major de sa pro­mo­tion et veut ser­vir dans de 1er régi­ment de chas­seurs para­chu­tistes en opé­ra­tion à Gao, au Mali. Parce que son pré­nom, qui dans sa langue natale signi­fie vir­gi­nité, pureté, prête à des plai­san­te­ries dou­teuses, elle se fait appe­ler Vir­gi­nie.
Quand elle arrive dans son unité, c’est la crise. Le méde­cin en titre, blessé gra­ve­ment, est éva­cué. Elle doit donc faire face, seule, aux situa­tions dra­ma­tiques lorsque les sol­dats sont fra­cas­sés dans des explo­sions, dans des embus­cades… Mais le dan­ger est par­tout et Vir­gi­nie va en faire l’amère expérience…

S’il y a pas mal de “bour­rins”, le scé­na­riste met en scène des per­son­nages sym­pa­thiques qui ne véhi­culent pas de pré­ju­gés sur les femmes. Le des­sin de Gilles Laplagne est très réa­liste. Il est atten­tif aux détails, soigne la repré­sen­ta­tion de l’ordinaire du sol­dat, l’équipement, le maté­riel uti­lisé et les condi­tions rudes du quo­ti­dien. Mais il pro­pose éga­le­ment des décors natu­rels de toute beauté. Il fait res­sen­tir le dyna­misme des actions et relaie fort bien l’intensité émo­tion­nelle lors des com­bats, des atten­tats.
Rémi Le Capon a été chargé de la mise en cou­leurs, tâche dont il s’acquitte avec brio, avec les teintes des uni­formes et des fonds noc­turnes attrayants.

Un repor­tage de seize pages de Régis Le Som­mier, illus­tré de pho­tos d’Alexandre Parin­gaux, inti­tulé : “En mis­sion avec les com­man­dos para­chu­tistes de Bar­khane” com­plète heu­reu­se­ment l’album. Ce pre­mier volume du dip­tyque est attrac­tif pour le côté docu­men­taire bien étayé et pour une intrigue qui amène l’héroïne dans une bien fâcheuse posi­tion.
On a hâte de connaître la façon dont elle va pou­voir se sor­tir de ce très mau­vais pas.

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serge per­raud

Patrice Buen­dia (Scé­na­rio), Gilles Laplagne (des­sin), Rémi Le Capon (cou­leur album) & Ketty For­mag­gio (cou­leur cou­ver­ture), Méde­cins de guerre – t.01 : Ligne de vie, Dar­gaud, juin 2021, 64 p. – 15,00 €.