Colette Deblé, La même aussi

Effa­ce­ment et surlignage

Dessi­nant, pei­gnant, ravau­dant Colette Deblé réta­blit des atta­che­ments et des dépla­ce­ments de “vieilles” images aux siennes. « J’arrache, extrais, isole, ravis, détache, extirpe la femme du contexte, pay­sage, situa­tions, acti­vi­tés, com­pa­gnons, com­pagnes, repré­sen­ta­tions, places, mises en scène mytho­lo­giques, toi­lettes, inti­mi­tés, vani­tés, époques, patrie. »
L’arrachement est une manière d’offrir une liberté aux femmes par ses repré­sen­ta­tions plas­tiques dans l’histoire de l’art et dans l’histoire en général.

D’où ce tra­vail que l’artiste  défi­nit ainsi “Je suis le trem­blé entre la réfé­rence et ma sil­houette, je déchire à la main l’intissé tout coton que je contre­colle en double épais­seur ; et ces formes de femmes sont accro­chées sans cadres, en ape­san­teur, en toute plé­ni­tude”. Le déta­che­ment à par­tir d’images-mères de cer­tains frag­ments, repris dans une rhé­to­rique par­ti­cu­lière, crée un dépouille­ment pour se concen­trer sur la noblesse des femmes au-delà de tout cadres et cadrages.

Un tra­vail de jubi­la­tion appa­raît pour le res­pect et la gra­ti­tude envers les femmes. Des­sins, pein­tures et lavis suf­fisent.
Exit le logos pour reprendre les repré­sen­ta­tions de la femme depuis la pré­his­toire jusqu’à nos jours.

L’ana­lyse visuelle devient une pra­tique. Et en ce sens, Colette Deblé des mises ne pra­tique pas la simple “cita­tion’. Il s’agit d’ “user” l’image ori­gi­nale afin qu’elle parle autre­ment à tra­vers ce qu’elle nomme des “pous­sées”.
Il y va de l’effacement et du sur­li­gnage dans un long che­min qui res­semble à une épo­pée où l’artiste ne cesse de trancher.

L’éner­gie est là pour expri­mer non la fureur mais un exer­cice de dou­ceur “comme la sève qui monte dans les arbres, comme le foutre dans l’amour – inépui­sable” dit-elle.
La pré­sence rete­nue dépasse la pré­sence pre­mière dans cet hom­mage aux femmes “sans qui nous ne serions pas là.”

jean-paul gavard-perret

Colette Deblé, La même aussi, Aen­crage & Co, novembre 2009 — 16,00 €.

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