Benjamin Rosenberg, À côté

Une jeu­nesse perdue ?

Huit ans après la publi­ca­tion de sa mise en abyme sociale Fran­ce­bi­tume, l’éternel jeune auteur aujourd’hui âgé de 30 ans publie une nou­velle ode à la musique, cette fois la musique clas­sique et l’électro.
Après avoir tenté de polir le dia­mant brut qu’est la jeu­nesse des cités, il s’attache ici à com­prendre la vie de ceux qui ont tout mais qui peinent pour­tant à trou­ver un sens à l’existence : les jeunes hips­ters parisiens.

Entre la réa­lité vir­tuelle pro­po­sée par les réseaux sociaux, la per­ma­nence des drogues et l’inquiétude vis-à-vis du monde, cette jeu­nesse semble se perdre dans ce que Kun­dera nomme « le kitsch », autre­ment dit les sym­boles, le paraître. Obnu­bi­lés par le nombre de likes de leur der­nière publi­ca­tion Ins­ta­gram ou par l’image qu’ils ren­voient, cer­tains des pro­ta­go­nistes ne sont pas épar­gnés par l’auteur.
L’un d’entre eux, Arthur, soli­taire adepte du can­na­bis et du cocon vers lequel il trans­porte, s’inscrit à l’inverse dans une démarche d’authenticité. Le but de son exis­tence est de constam­ment s’enrichir de savoirs. De la musique clas­sique à la lit­té­ra­ture en pas­sant par une quête exis­ten­tielle qui le mènera jusqu’en Inde, il semble avoir besoin de trou­ver un sens pour apai­ser sa conscience.

L’auteur nous pré­sente donc trois jeunes gens qui vont cha­cun évo­luer à leur façon pour deve­nir des adultes. Il insiste sur la pré­ca­rité du monde de l’Art à tra­vers la vie de Féli­cien et Max, un écri­vain et un artiste-peintre. Tous deux sont amou­reux de leur art mais, faute d’argent, ils vont devoir le lais­ser de côté pour trou­ver un emploi ali­men­taire.
L’évolution de ces per­son­nages, artistes idéa­listes prêts à tout sacri­fier pour leur rêve au début de l’ouvrage, puis rési­gnés à rejoindre le monde du tra­vail tout en n’abandonnant jamais leur pas­sion, est sai­sis­sante de réalité.

Ce court roman met en scène une jeu­nesse per­due et para­doxale : vir­tuel­le­ment ren­fer­mée sur elle-même et pour­tant ouverte sur le monde. Il immor­ta­lise éga­le­ment l’est-parisien d’aujourd’hui, sa vita­lité, son arro­gance, sa jeu­nesse.
Un bol d’originalité teinté de cynisme dans cet océan de bons sen­ti­ments qu’est la ren­trée lit­té­raire d’hiver 2020.

louis taillan­dier

Ben­ja­min Rosen­berg, À côté, l’Harmattan, Paris, 2020, 146 p. — 15,00 €.

 

 

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