Tirez sur le pianiste

Cette adap­ta­tion jazzy d’une série noire de David Goo­dis per­met à Truf­faut de paro­dier les canons et cli­chés habi­tuels du genre en signant ici un film psy­cho­lo­gique qui est tout aussi bien un thril­ler qu’une comédie

Dans le lan­gage figuré et fami­lier, la for­mule « Ne tirez pas sur le pia­niste » signi­fie qu’il faut être indul­gent envers une per­sonne qui fait preuve de bonne volonté. Pia­niste du bis­trot pois­seux de Plyne, Char­lie Koh­ler (Charles Azna­vour), de son vrai nom Edouard Saroyan, un ancien vir­tuose du cla­vier, ne manque pas de volon­ta­risme, mais il semble qu’un des­tin indé­crot­table lui colle aux sou­liers. Ce pianiste-là, on lui tire des­sus constamment !

Parce que ses deux frères ont des ennuis avec des truands, Char­lie, un homme dis­cret tout en vul­né­ra­bi­lité et en poé­sie qui est tombé dans l’alcool parce que sa femme s’est jadis sui­ci­dée, doit inter­ve­nir dans un règle­ment de comptes qui va pro­vo­quer une série de réac­tions en chaîne. Dont la mort du patron Plyne par notre timide jaz­zo­phile de ser­vice et sa fuite avec la ser­veuse Léna (Marie Dubois) qui vou­drait que le musi­cien recouvre son âme, son iden­tité pre­mière. Mais l’appel du bas­tringue et des bas-fonds est tou­jours plus fort que l’amour et la rédemption…

Prix de la nou­velle cri­tique (France) et de la pho­to­gra­phie (Alle­magne), Tirez sur le pia­niste est un polar en noir et blanc qui change radi­ca­le­ment en 1960 les pers­pec­tives — un brin clas­siques — ouvertes avec Les 400 coups. Cette adap­ta­tion jazzy et déses­pé­rée d’une série noire de David Goo­dis per­met à Truf­faut de paro­dier sans ver­gogne les canons et cli­chés habi­tuels du genre en signant ici un film psy­cho­lo­gique qui est tout aussi bien un thril­ler qu’une comé­die. Un voyage vers le passé qui coïn­cide avec l’exploration à répé­ti­tion du refoulé qui hante un homme (le véri­table gang­ster ne serait-il pas en défi­ni­tive le corps de la femme ?) Une œuvre en clin d’oeil à la série B amé­ri­caine et au polar alcoo­lisé qui insiste avec force sur le rôle phare, quand bien même tra­gique, joué par les femmes dans l’univers étri­qué des voyous à la petite semaine. Ou de l’art majeur de brouiller les pistes interprétatives…

A noter dans les bonus, outre les savou­reux com­men­taires de Marie Dubois, la séquence où le cinéaste explique pour quelle rai­son il a choisi d’adapter Goo­dis, alors qui abhorre les films de gangsters !

fre­de­ric grolleau

Tirez sur le pianiste

Avec : Charles Azna­vour, Nicole Ber­ger, Marie Dubois, Bobby Lapointe, Michele Mer­cier, Albert Remy Réa­li­sa­teur : Fran­çois Truf­faut / • Date de paru­tion : 20 février 2002 • Édi­teur : mk2 / Détails de l’édition : • Zone 2 (Europe, Moyen-Orient & Japon seule­ment) / Bonus : • Pré­sen­ta­tion du film par Serge Tou­biana • Com­men­taire du film par Marie Dubois, Raoul Cou­tard • Fran­çois Truf­faut parle du film et com­mente quelques scènes (1965) • David Goo­dis : Fran­çois Truf­faut parle de l’écrivain et de l’adaptation du roman “Down there” (1982) • Les bouts d’essai de Marie Dubois (1959) • For­mat plein écran et cinémascope

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