Patrick Rollet, Descentes aux limbes. Confins du cinéma

Mimé­sis et opium optique

Le parti-pris de Rol­let est clair. Il ne retient que les films capables de pro­po­ser de rejoindre nos limbes et notre incons­cient. Il retient ce qui, dans le cinéma, appar­tient à la révé­la­tion de l’« incons­cient visuel » par les « espace néga­tifs » que creusent sou­ter­rai­ne­ment les “films ter­mites” libé­rés de toutes pro­pen­sion à la simple dis­trac­tion par effet miroir.
L’auteur s’appuie sur un cer­tain cinéma hol­ly­woo­dien (Vic­tor Sjös­tröm, Leo McCa­rey, Jacques Tour­neur, Samuel Ful­ler), des oeuvres under­ground (Helen Levitt, Janice Loeb, James Agee, Robert Frank) et celles inclas­sables Jean-Claude Biette ou de Danièle Huillet et Jean-Marie Straub.

Leurs dif­fé­rentes réver­bé­ra­tions prennent une force sub­ver­sive dans une confron­ta­tion qui s’articule à la fois sur de l’artifice et sur du concret. Le pre­mier devient l’architecture du second et vice-versa au sein de telles approches. Elles donnent l’image d’une vaste et déri­soire comé­die humaine des miasmes et pro­fon­deurs.
S’y engouffre tout l’inconscient de l’individu et du collectif.

Rollet révèle tout un pan des trans­for­ma­tions de la nar­ra­tion par divers types d’effondrements. Elles amusent, intriguent, angoissent. Il existe dans ce jeu quelque chose d’essentiel : à savoir qu’une une idée d’un indi­vidu ne peut exis­ter sans son contraire et que la lumière de l’image ne peut se pas­ser de son ombre por­tée.
De tels films ne se construisent pas exclu­si­ve­ment avec un réfé­rent réel mais sur­tout avec un réfé­rent déjà imagé mais qui se dégage de tout ima­gi­naire frelaté.

Certes, les choix de l’auteur sont par­tiels et par­tiaux. Et cha­cun selon ses goûts et ses options trou­vera à redire.
Mais Rol­let pose comme préa­lable un doute quant au champ de la repré­sen­ta­tion pour y cher­cher ce qui résiste du réel, ce qui à l’inverse appar­tient au simu­lacre et ce qui fait tra­vailler l’inconscient par un com­bus­tible bien dif­fèrent que le simple opium optique fait pour satis­faire les besoins les plus immé­diats de la mime­sis.

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jean-paul gavard-perret

Patrick Rol­let, Des­centes aux limbes, P.O.L édi­tions, 2019, 272 p. -  19, 90 €.

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