Chrystel Caparros entreprend un travail de fond où le fortuit permet de trouver des points repères significatifs à une quête autant intérieure qu’à valeur collective. Mais, lorsqu’elle aborde le thème de la migration, la photographe sait trouver des angles plus poétiques et forts que la simple vision réaliste. Cherchant néanmoins dans la réalité ce qui la touche, la photographe la transforme par effet de décalage ou de focalisation sur des points particuliers. Elle se dégage de la pseudo dualité “feintes et vraisemblances” pour trouver des plans de segmentation afin de retenir une vérité d’incorporation.
L’objectif n’est pas d’envoyer le “voyeur” dans l’irréel et le spectaculaire. L’artiste souligne par la photographie ses émotions et pincements du cœur. Manière de se « relire » et de relier des mondes et de reconsidérer les lieux et les images. L’objectif est d’amener le public à un regard différent sur des espaces publiques ou intimes face à une indifférence que l’artiste casse.
Chrystel Caparros : Niepcebook n°7, mars 2018, Corridor Elephant, Paris
Entretien :
Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Mon réveil, quand je l’entends.
Que sont devenus vos rêves d’enfant ?
Ils prennent forme.
A quoi avez-vous renoncé ? A ce qui n’est pas important.
D’où venez-vous ?
De là-bas.
Qu’avez-vous reçu en dot ?
L’humanité.
Un petit plaisir — quotidien ou non ?
Le café et la cigarette.
Qu’est-ce qui vous distingue des autres photographes ?
C’est une bonne question
Comment définiriez-vous votre approche du portrait ?
Cela dépend de la personne photographiée, de mon rapport avec elle et aussi du sujet. Cela peut être très frontal ou alors au contraire complètement dévié, décalé voire évité. Rarement mis en scène en tous cas.
Quelle est la première image qui vous interpella ?
Si on parle de photo, c’était très probablement une image en noir et blanc. Laquelle précisément, je ne sais pas. Peut-être une photo de Raymond Depardon ou d’Eugène Smith qui ont été mes premiers coups de foudre photographiques.
Et votre première lecture ?
Peut-être « Oui-oui et la voiture rouge » (bon, j’imagine qu’on a dû vous la faire 100 fois celle là .
Quelles musiques écoutez-vous ?
Un peu de tout mais principalement du rock et des musiques du monde.
Quel est le livre que vous aimez relire ?
« L’ombilic des limbes » d’Antonin Artaud mais là ça fait bien bien longtemps !
Quel film vous fait pleurer ?
« Bambi » et « Elephant man » (et plein d’autres mais je ne sais plus)
Quand vous vous regardez dans un miroir qui voyez-vous ?
Moi qui me regarde dans un miroir.
A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
A mon chat, il ne comprendrait pas.
Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
Samarcande ou Ispahan juste pour la sonorité et l’imaginaire que leur nom évoque.
Quels sont les artistes et écrivains dont vous vous sentez le plus proche ?
J’ai une âme romantique (ou adolescente) donc je me sens proche d’artistes qui ont un univers noir, un peu torturé (Antonin Artaud, Van Gogh, Michael Ackerman, Roger Ballen…). Mais j’aime aussi un tas d’autres artistes et écrivains pas torturés voire optimistes et drôles.
Qu’aimeriez-vous recevoir pour votre anniversaire ?
Un billet d’avion ou du matériel photo.
Que défendez-vous ?
La veuve, l’orphelin et la liberté.
Que vous inspire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est donner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
Ben, je ne dois pas la comprendre. Je pense que c’est plutôt donner ce que l’on croit ne pas avoir à quelqu’un qui n’a rien demandé.
Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la question ?“
Oui.
Quelle question ai-je oublié de vous poser ?
Quelle était la question ?
Présentation et entretien réalisés par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com , le 6 février 2018.