De Rousseau à rien
Le film n’est pas insupportable. Du moins pas en totalité. Mais d’une certaine façon, il est pire. Certes, comme son héros, on en survit. Au moins au début. Au moins pour ceux qui aiment les combats d’ours. Les prouesses techniques sont au service de la confrontation homme nature. Mais hélas ! le film rousseauiste tourne progressivement à l’histoire de vengeance avec ses ressorts psychologiques lourdingues et dans l’ignorance du Contrat social. Certes, les orgues des plans généraux donnent à la photographie et au décor son pesant de plaisir. Mais le spectateur est venu voir autre chose qu’un moyen métrage du National Geographic.
Que l’histoire soit inspirée de faits réels ne sauve rien dans cet univers où l’homme est un sauvage qui ignore toute problématique de lois. L’esclavagisme de la Compagnie qui emploie le héros et ce que le cinéaste aurait pu en faire sont escamotés pour — théoriquement au moins — un film d’action. Il reste d’une qualité douteuse : la linéarité narrative de la survie est filée à l’antienne et à l’encan. Même le western et sa « jubilation » — annoncée par le premier combat d’indiens — capotent.
D’autant que le scénario est non seulement improbable (la survie du personnage incarné par Di Caprio demeure plus qu’invraisemblable) mais surtout ennuyeux. Le film pourrait presque tourner en une comédie : ce qui l’aurait sauvé. Hélas ! c’est au plus du sous-Terence Malik. Les recettes sont éculées et parfaitement inutiles. La réhabilitation de l’humain (thématique supposée du film ?) est idiote telle qu’elle est scénarisée.
Le cinéaste cite Tarkovsky et son Sacrifice : il en est pourtant bien loin. Sa soif du mal tourne à la pitrerie baveuse et rampante. Exit tout rapport à l’Histoire ou son archéologie. Le jeu de Di Caprio se réduit à une composition caricaturale. C’est presque lamentable qu’il ait reçu son Oscar pour un faux film d’ « immersion » (nouvelle mode du cinéma) réduit à du gadget et de l’anecdote. Di Caprio y restera — selon la formule consacrée — un bon acteur auréolé pour un mauvais film.
jean-paul gavard-perret
The Revenant
Date de sortie: 24 février 2016 (2h 36min)
De : Alejandro González Iñárritu
Avec: Leonardo DiCaprio, Tom Hardy, Domhnall Gleeson
Genres : Western, Aventure
Effectivement le sacre du roi Léo est frauduleux . Buse échappée de la gadoue d’une cour des miracles du moyen âge : Caprio c’est fini !