Incessant ressac du traumatisme
© Nurith Wagner Strauss
Des écrans datent les faits, nomment la protagoniste, qu’on voit vivre dans son appartement, par la fenêtre mais aussi par les caméras qui filment ses mouvements. Une musique de requiem trash semble la mener sourdement au dernier sacrifice. C’est sa pensée qui est bercée de douleurs, ressassant sans cesse les blessures de l’Holocauste, subie par sa mère lorsqu’elle la portait. On assiste à l’exploration cruelle d’un traumatisme constitutif : née dans le camp d’Auschwitz, la mère conçoit toute sa vie comme une résistance à l’oppression. Les détails ne nous sont pas épargnés ; c’est une existence qui se dévoile dans la réminiscence de l’agression destructrice qu’elle a initialement subie. Le spectacle apparaît volontairement plombé par une lutte morbide des personnages contre eux-mêmes.
Survient une inondation, violente et durable, qui pourrait constituer pour la fille une douche purificatrice. Mais l’eau continue de couler à grand débit dans l’appartement. On retrouve l’appartement après le décès de la mère ; le (petit-)fils y organise une rencontre festive en attendant sa mère pour les obsèques. Il s’agit d’explorer l’évolution des sentiments et des comportements au fil des générations dans une famille rescapée du traumatisme de la Shoah.
La représentation procède d’une poésie radicale, un peu déjantée, qui déconcerte un peu par la longueur de ses procédés et l’épaisseur de ses traits. Incontestablement intéressant, le spectacle est toutefois appuyé. Il paraît ne pas à terme s’extirper de l’expression du ressassement incessant de la douleur inscrite dans la chair.
christophe giolito
Parallax
Texte de Kata Wéber avec l’ensemble de l’équipe
Mise en scène Kornél Mundruczó / Proton Theatre
En hongrois, surtitré en français
de et avec Soma Boronkay, Emőke Kiss-Végh, Erik Major, Bence Mezei, Csaba Molnár, Lili Monori, Roland Rába, Sándor Zsótér.
Dramaturgie Soma Boronkay, Stefanie Carp ; scénographie Monika Pormale ; lumière András Éltető ; costumes Melinda Domán ; musique Asher Goldschmidt ; chorégraphie Csaba Molnár ; cameramen Máté Takács, Mihály Teleki, Áron Farkas.
Au théâtre de l’Odéon Ateliers Berthier 1, rue André Suarès 75017 Paris
Du 10 au 18 octobre 2024, du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 15h. Représentations surtitrées en anglais les vendredis 11 et 18 octobre. Toutes les représentations sont surtitrées en français. À partir de 16 ans. Ce spectacle comporte des scènes à caractère sexuel pouvant heurter la sensibilité du public.
Créé le 27 mai 2024 au Wiener Festwochen – Freie Republik Vienne.
Production Proton Theatre – Budapest coproduction Odéon-Théâtre de l’Europe, Wiener Festwochen – Freie Republik Vienne, Comédie de Genève, Piccolo Teatro di Milano – Teatro d’Europa (Milan), HAU Hebbel am Ufer – Berlin, Festival d’Athènes-Épidaure, Festival d’Automne à Paris, Maillon – Théâtre de Strasbourg / scène européenne, International Summer Festival Kampnagel – Hambourg, Centre dramatique national d’Orléans – Centre-Val de Loire, La Bâtie – Festival de Genève avec le soutien de 220volt, Számlázz.hu, Minorities Talents&Casting, Danubius Hotels avec le soutien du Cercle Giorgio Strehler en coréalisation avec Festival d’Automne.
Tournée 2025 13, 14 et 15 mars – Piccolo Teatro di Milano.