(Comment réinventer le monde)
Au-delà de l’amour, il y a un désert. Pas de mer, de rivage de granit, ni l’immensité d’un plateau crayeux. De fait, c’est l’antique pénéplaine s’étendant tout au loin avec ses herbes rares. Il y a aussi des appels d’oiseaux et un lézard au milieu des épines — pardonnons sa sottise. Mais, désormais, mères, emportez vos enfants et jeunes gens, fuyez au galop, cachez-vous dans des grottes.
Au nom de l’humanité entière, entamez des pourparlers avec vous-même sans rester la nourriture des dieux. La servilité des hommes, en tant que mangés n’est plus. Soyez les valeureux guerriers du commun des mortels. Peu à peu, vous devenez remous de la venante houle. Sonnez le futur, inventez un mystère qui se moque du destin malveillant.
Votre front est un secret, vos yeux des flammes et vos mains la vie. Approchez-vous du rivage de l’enfance. Certes, je n’entends ni fifres ni tambours mais je vous écoute attentivement et je vous attends après des milliers d’années. Vous retrouvez les forêts primitives. Je vois par longue-vue la berge et bientôt ce monde éloigné de la mer que maudissaient les pêcheurs.
Voici l’ouragan fou avant de s’enrouler en un châle de soie. Ce ne seront plus les pendus qui le portent sur leurs épaules et qui se remplissaient les poches de joyaux froids. D’une étoile de bois bâtie de petits losanges par les mains les plus jeunes, vous êtes sorti du désert. Il n’est pas fait pour votre nuit dont le soleil s’exile. Chaque corps cache encore la tendresse de vos gestes mais ne les recouvre plus d’un rideau de rouille.
Des amours se déclarent. Plus besoin de charbon dans la mer pour attiser les vagues. Marchez surchargés de pétales de roses. Toutes les destinations portent leur nom. Revenus des enfers, chantez vos nouvelles histoires à travers le verre d’un givre d’or recouvert de vos mains. Grandissez et porter vos messages. Peu à peu, ils seront lus pour respirer de l’intérieur. Des formes planent, dessinent des lettres, s’élèvent et se mélangent. Des prunes de Cythère, le calice sera à la rosée. La rosée est déjà à sa perle.
jean-paul gavard-perret
photo de Bob Carlos-Clarke
Belle envolée lyrique ! Mais Capri c’est fini .