Dans les poèmes d’Emily Dickinson quelque chose d’inconnu nous attend. On n’y entre pas pour voir avec ses yeux, mais pour écouter le noir, voir par les oreilles, savoir à nouveau les questions des enfants dont la poétesse s’empare.
C’est un enclos comme jeté en scène par elle-même. Elle force à l’arrachement à soi, toujours comme une étrangère, une exilée et comme tombée de son vrai lieu. Elle écrit pratiquement surprise de s’entendre mais nous permet de revivre son entrée en elle, dans son corps incompréhensible.
Dans ses poèmes, Dickinson respire par un autre qui mieux qu’elle mord aux paroles vivantes. Mais elle ne porte pas ses paroles : elles descendent d’elle pour venir dans son corps quitte à tomber en écartement, se diviser et se jeter aux points cardinaux…
Mais la langue vient sur elle et souffle là où les poèmes dénouent un drame mental, le délient mais comme si le drame était le vrai lieu de la pensée.
jean-paul pavard-perret
Emily. Dickinson, Du côté des mortels — Poèmes 1860-186, traduction François Heusbourg, postface Claude Ber, Éditions Unes, 2023, 152 p. — 21,00 €.