Jean-Jacques Nuel, Hermès Baby — ma machine à écrire

Conseils à un jeune poète

Cette édi­tion est par­tie d’un constat dressé par l’auteur. A savoir que les réponses néga­tives à l’envoi d’un tapus­crit à un édi­teur arrivent après deux mois.
Une réponse posi­tive ne met pas plus que huit jours.

De fait et quoique la réponse soit dans le cas de ce livre favo­rable, la réponse du Bou­cher s’est faite attendre.
Après deux ans, ce livre sort enfin don­nant à l’éditeur, aux lec­teurs (et nous l’espérons, à l’auteur) un plai­sir tou­jours intact.

Toute­fois, les lec­teurs doivent être atten­tifs. Imprimé sur du papier Fedri­goni rouge, le texte est pris en sand­wich au milieu d’un nombre consé­quent de page blanches et vierges.
La par­tie “jam­bon” est donc réduite. Manière de mini­mi­ser les ambi­tions d’un auteur qui à tort ou à rai­son dit avoir exa­géré l’importance de ses écrits tapés jadis sur une machine à écrire “qui por­tait un nom / magni­fique / Her­mès Baby”.

Fidèle à son humour et son ala­crité, Nuel se contente donc de quelques aveux. Non seule­ment sur la dif­fi­culté d’être publié, mais sur la contrainte infligé à un auteur sou­mis à la des­ti­née de gagner sa vie par des tra­vaux intel­lec­tuels.
La poé­sie est en effet loin de nour­rir son homme.

Celui qui se retrouve tra­vailleur de force, puisqu’il est forcé de tra­vailler, rap­pelle en ses conseils au jeune poète quelques véri­tés pre­mières. Entre autres, qu’il faut connaître le métier de vivre pour seule­ment pas­ser ensuite à celui d’écrire.
Et ce, même si dès la classe de 3éme un ensei­gnant atten­tif vous gra­ti­fie d’être poète. Ce qui laisse pour autant à ses cama­rades de classe le droit d’en douter.

Mais celui qui très sou­vent prit le TGV entre Lyon et Paris ne put en dou­ter même si, pen­dant trop long­temps, il dut sacri­fier son écri­ture à des gri­bouillis plus ou moins admi­nis­tra­tifs et riches en super­fi­cia­lité. Pas for­cé­ment fleg­ma­tique, Nuel néan­moins ne noir­cit pas le tableau mais rap­pelle le temps perdu à bien des vicis­si­tudes plus désa­gréables que tota­le­ment nui­sibles.
En fili­grane, le poète rap­pelle que l’habitude du rai­son­ne­ment et de la spé­cu­la­tion est l’indice d’une insuf­fi­sance vitale et d’une dété­rio­ra­tion de l’affectivité.

C’est peut-être aussi une manière de prou­ver que seuls ceux qui, à la faveur de leurs défi­ciences, par­viennent à s’oublier, font corps avec leurs idées

jean-paul gavard-perret

Jean-Jacques Nuel, Her­mès Baby — ma machine à écrire, coll. “Carné poé­tique”, édi­tions La Bou­che­rie Lit­té­raire, 2021, non paginé — 10,00 €.

Leave a Comment

Filed under Poésie

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>