Gabriela Torres Ruiz : le génie des non lieux
Le photographe et architecte Gabriela Torres Ruiz photographie le “silence tel que ce qui fut / avant jamais / par le murmure déchiré” (Beckett) au sein des lieux qui l’engendrent. Tout joue entre lumière, couleur, espace au sein de paysages de forêts alpines et de l’Islande ou d’intérieurs en ruines présentés sous formes de diptyques et triptyques.
Le regardeur entre dans la fente du silence que l’image ne comblera jamais mais souligne. Demeure un chaos des formes possibles dont aucune ne se détache dans un miroitement perpétuel des traces aussi évidentes qu’indicibles au cœur de l’écoulement du temps. Il devient un fleuve qui enfle.
D’où cette dérive : ce n’est donc pas seulement une pensée qui porte vers le silence mais le flux de chaque photographie. Elle le fait parler par flux persistant pour la dispersion insistante du tout ce qui reste jusqu’à ce point limite où ne demeurent que des magmas. Chaque dépôt prend valeur de mystère. L’absence y devient le meilleur des biens.
jean-paul gavard-perret
Gabriela Torres Ruiz, Silence, Hatje Cantz, Berlin, 2017, 128 p. — 40 ‚00 €.