Anne-France Abillon & Ryuji Taira les « filambules »
Anne-France Abillon et Ryuji Taira ne sont pas à la recherche du temps perdu, ils préfèrent retenir celui qui reste même si on en connaît toujours si peu. Les deux artistes l’enferment ou plutôt le trament visuellement afin de lui accorder une consistance. L’artiste et le photographe, en leurs œuvres « en répons », lui donnent l’existence d’un souffle mystérieux par effet de métaphore. Sans fin dans le corps, sans fin dans l’âme, sans fin absolument, le temps est délimité. Et si le temps voltige, les artistes par leurs images s’en font les funambules et les « filambules ».
Surgit une histoire de regard. Et autre chose encore et comme au dedans des yeux. L’image défait les liens du visible pour que l’insaisissable prenne paradoxalement « corps » et afin que l’éternel absent si présent reçoive une densité diaphane en divers types de filaments. L’art le révèle : tiré hors du sommeil de larve, il devient papillon, de quark en quark, dans l’espace que nul ne peut penser.
Le cosmos rejoint le microcosme et la terre, l’éther en cheveux d’écume. L’étreinte du temps ne se resserrera pas pour autant : le fugueur est simplement là entre des filets qui, faisant de subtils barrages, donnent à l’informe une possibilité de cadences.
jean-paul gavard-perret
Anne-France Abillon & Ryuji Taira, Tisser le temps, Galerie Sit Down, Paris, du 7 au 29 septembre 2016.