Women House – La maison selon elles (exposition)
Maison des femmes et une nouvelle vision de l’objet d’art
La Monnaie de Paris a proposé jusqu’en janvier 2018 une exposition qui quoique justement appréciée n’a pas eu le retentissement que reçoit l’actuelle rétrospective Grayson Perry. C’est dommage. D’autant que cette exposition annonçait en quelque sorte celle de l’Anglais « inconvenant ». Elle explorait entre autre ce qu’il reprend selon ses critères iconoclastes.
A savoir deux éléments toujours reliés dans la culture fait pour les hommes et par eux : un genre (le féminin) et un espace (le domestique). En effet, depuis que le monde est ce qu’il est, le mâle s’est emparé de l’architecture et de l’espace public pour « reléguer » à la femme l’espace qui, quoique privé, est pour elle parfois refuge mais souvent une prison.
L’exposition « Women House » prouvait le contraire. Coproduite avec le « National Museum of Women in the Arts » à Washington où elle s’est déplacée depuis mars 2018, elle montre comment 39 artistes femmes du XXe et XXIe siècle s’emparent du sujet pour replacer la femme au centre d’une histoire dont elle était absente.
Les règles de la présentation ont touché jusqu’à l’objet d’art créé pour cette occasion. Il renverse en effet – en la biffant – la notion de signature afin de valoriser le sens de l’objet. Cette production des plus originales est une structure montable. Manière de symboliser que cet espace est encore à construire. Il met en évidence la revendication de l’espace de travail chez soi tel qu’il fut théorisé, il y a 90 ans, par Virginia Woolf dans Une chambre à soi. L’Anglaise encourageait dans son essai les femmes à trouver un espace intime.
C‘est bien là la date de « départ » de Women House, dont l’ambition se poursuit de manière thématique à travers des jeunes artistes femmes et celles des années 70 qui furent les premières à se rebeller contre la privation d’espace réel d’exposition, de travail et symbolique de reconnaissance. Disposée en huit chapitres, l’exposition reflète l’imbrication des points de vue.
Se retrouvent des artistes emblématiques avec comme tête de pont Claude Cahun, de nouvelles venues : Pia Camil, Nazgol Ansarinia, Joana Vasconcelos, Laure Tixier et Elsa Sahal etc. et des artistes emblématiques de la féminitude telles que Louise Bourgeois, Niki de Saint Phalle, Martha Rosler, Cindy Sherman, Rachel Whiteread mais aussi les activistes de la théorie du genre féminin en acte dont Birgit Jürgenssen.
Camille Morineau , Directrice des Expositions et des Collections de la Monnaie de Paris et Lucia Pesapane, Commissaire d’exposition à la Monnaie de Paris sont à la base de cet ensemble exceptionnel comme de l’idée de l’ « éterniser » (grâce à l’atelier du lieu) par la « pièce montable » anonyme de bronze. Celle-ci prouve, qu’à l’inverse des créateurs hommes, ce qui compte pour de telles créatrices, la valeur ajoutée, tient moins à la signature qu’à l’œuvre elle-même.
Et c’est un beau pied de nez à toute une idée de l’art que la Monnaie de Paris s’enorgueillit d’initier en mettant la tradition au service d’un art expérimental.
jean-paul gavard-perret
Women House – La maison selon elles, Monnaie de Paris, Paris. L’exposition a eu lieu du 20 octobre 2017 au 28 janvier 2018. Le catalogue (35,00 €), l’album (9,00 €)et l’objet sont encore disponibles.