Part à l’aile
(Comment trouver la fin ?)
Tu t’arrêtes, tu me demandes pourquoi je te raconte cela. Je ne sais pas. Assommé de chaleur, de mes lèvres molles suintent un filet de salive. Mes mots sortent entre deux grognements de gorge et me paraissent vains. Nos corps s’enfoncent dans l’hiver et atteignent le degré le plus fragile nous laissant seul.
Tu peux décider, depuis ce point vulnérable, de mettre un terme, ou d’attendre encore, d’autant que tu électrise ma vie de fragments chaque jour qui claque et m’atomise. Mais à ce point, la question à notre départ est mal posée.
Nous le sentons : notre parcours se biaise et notre esprit se brouille sans épiloguer nos heures. Moins avec de sérénité que de pérennité, grain à grain, notre sablier rejoint, sinon notre paix notre fin sans faim. Nous aurons donc tété et mâchouillé nos entrées et desserts avec nos idées dépassées en passé empiété cousu au point de croix.
Communs, nous sommes comme les mortels non prévenus de finir comme, jadis, de commencer. Ni précurseurs ni suiveurs des Saintes Ecritures, sans nous soucier de les regarder d’un peu plus près, épuisons notre ligne jusqu’à sa fuite.
jean-paul gavard-perret
Photo Yann Morva