Maxime Chattam, Que ta volonté soit faite
Et si le diable était un homme ?
Carson Mills, petite ville du Midwest américain, pourrait être une ville paisible si Jon Petersen n’y avait vu le jour. Dés son enfance, le Mal semble habiter Jon, et ses camarades de classe, apprennent très vite à le craindre. Seule l’autorité paternelle semble arriver à limiter les débordements violents de Jon. Mais une fois devenu adulte, plus personne ne semble pouvoir s’opposer à Jon, dont les perversions vont crescendo. Le premier viol dont il est auteur adolescent va amorcer toute une série d’événements criminels, qu’il va perpétrer en toute impunité en vieillissant. La région ne connaîtra une brève accalmie que quand Jon prendra une épouse et aura un enfant. Mais le Mal ne peut se cacher longtemps, et son fils en fera lui aussi les frais. Quelqu’un pourra-t-il un jour mettre un terme aux méfaits de Jon?
Que ta volonté soit faite est déjà le vingtième roman de Maxime Chattam, qui continue ici à explorer les pires noirceurs de l’âme humaine en y campant un de ses personnages les plus vils, un vrai pervers psychopathe qui terrorise toute une région de l’Amérique des années 60 et 70. Certes, le lecteur est devenu coutumier de l’univers sombre constitué par Maxime Chattam tout au long de ses années. Tueurs en série, conspirations, folie meurtrière, quelques élements fantastiques sont quelques un des ingrédients récurrents de son succès, et l’on pourrait s’en lasser.
Mais ce n’est pas le cas avec ce nouvel opus, peut-être un de ses plus noirs et oppressants. Dés les premières pages, le lecteur est confronté à un psychopathe de la pire espèce. Caché sous les traits d’un voisin inquiétant, ses agissements sont relatés par un narrateur dont l’identité ne sera révélée qu’au final. Un homme (si Jon Petersen en mérite vraiment l’appelation) qu’on déteste d’emblée, qui nous effraie au plus haut point, et pour lequel on espère en toute franchise, un châtiment à la hauteur de ses actes. On peut donc très vite être mal à l’aise face à l’atmosphère pesante du roman. Jon Petersen est à Chattam ce qu’Hannibal Lecter est à Harris, et il est parfois difficile de tourner les pages, tant sa folie est grande. Pourtant, la chute en vaut la peine, et même si certains pourront y voir une solution de facilité, le dénouement les fera réfléchir sur la notion de vérité, de Mal, et de justice.
Ce qui pousse également le lecteur à continuer l’aventure est la description précise de certaines scènes, digne d’un criminologue ; l’écriture est scénarisée comme au cinéma, et Maxime Chattam peut se lancer dans un style tout à la fois d’une grande poésie et digne des plus grands maîtres du roman noir américain, aussi bien que dans une écriture plus trash, quitte à choquer. Le langage peut tout aussi bien se révéler métaphorique que d’une plus grande trivialité, ce qui peut vraiment déstabiliser plus d’une personne et rendre parfois l’histoire un peu inégale.
L’auteur saura donc vous captiver, vous fasciner, vous angoisser, vous faire trembler, mais également vous ennuyer aussi avec quelques descriptions trop longues, mais en tout cas il ne saura vous laisser indifférent. Ses connaissances de l’Amérique profonde, et la bonne utilisation du contexte historique, ancrent l’histoire de Jon Petersen dans la réalité, et c’est peut-être cela la plus grande réussite de Maxime Chattam : faire qu’en refermant ce livre, le lecteur prie Dieu ou les hommes de ne jamais croiser une telle incarnation du Mal.
franck boussard
Maxime Chattam, Que ta volonté soit faite, Albin Michel, 2015, 381 p – 21,90 €.